Dans une allocution de 28 minutes, ce lundi 13 avril, Emmanuel Macron a fait plusieurs annonces concernant la lutte contre le Covid-19. Décryptage.
Des remerciements hypocrites
La première partie de son discours a été dédiée à remercier les personnels de santé, les éboueurs, les caissiers, les chauffeurs routiers, etc… Ceux là même auxquels la politique anti-sociale menée par le gouvernement depuis trois ans s’attaquent frontalement. Il a en suite reconnu que l’État français n’était pas suffisamment préparé à une telle crise, tout en oubliant de mentionner que c’est notamment sa politique de réduction des moyens des hôpitaux publics qui a contribué à faire que justement les services hospitaliers n’étaient pas préparés. Les remerciements ne coutent rien et mettent le président du coté de ceux en première ligne.
Une sortie de confinement prévue pour le 11 mai
Emmanuel Macron a poursuivi son discours en annonçant que le confinement serait prolongé jusqu’au lundi 11 mai, tout en assumant timidement et implicitement que le confinement pourrait potentiellement durer plus longtemps. Cette langue de bois est irresponsable et créée des attentes et des espoirs au sein des masses populaires. Comment peut-il affirmer avec une quasi-certitude que le 11 mai marquera la fin du confinement, alors qu’il est impossible de savoir où en sera l’épidémie à ce moment là ?
L’économie plutôt que la santé
Sans surprise, Macron n’a pas annoncé la mise à l’arrêt de toutes les activités non essentielles. Afin de ménager les profits des capitalistes, il laisse ainsi se maintenir de nombreuses activités qui pourraient pourtant être mises à l’arrêt sans que cela ait trop d’impact. Cela met clairement en danger la santé de millions de travailleurs, ainsi que celle de leurs proches, mais une fois de plus, l’État Français fait primer le profit sur la santé. Pour les secteurs les plus impactés par le confinement (tourisme, évènementiel, restauration…), le gouvernement promet des aides massives ainsi que des annulations de charges. Apparemment, il n’y a pas d’argent magique… Sauf quand il s’agit de compenser les pertes des entreprises. Privatisation des profits, collectivisation des pertes. Voilà le maître mot. Car par l’inflation, les impôts ou d’autres méthodes, l’Etat devra trouver un moyen de rembourser les dettes : et les masses populaires passeront à la caisse.
Une aide pour « les familles les plus modestes et les étudiants les plus précaires »
Tout comme les services de renseignement, le gouvernement semble craindre un embrasement social à l’issue du confinement, c’est pourquoi une aide exceptionnelle sera versée aux personnes vivant dans une situation sociale très difficile. Les contours de la mesure n’ont pas encore été précisés, mais il y a fort à parier qu’il ne s’agira que de quelques miettes.
Une « réouverture progressive » des établissements scolaires à partir du 11 mai
Voilà probablement la mesure la plus scandaleuse et irresponsable de cette allocution. Le gouvernement prévoit donc de permettre le retour en classe des élèves de maternelle, primaire, collège et lycée à partir du 11 mai en « aménageant des règles particulières ». Reste à savoir comment le gouvernement compte faire en sorte que les élèves de maternelle et de primaire respectent bien les gestes barrière, ne s’approchent pas à moins d’un mètre les uns des autres, toussent et éternuent dans leur coude etc.
Avec cette mesure, le gouvernement risque tout simplement de créer une deuxième vague épidémique en provenance des écoles, mais la raison de cette réouverture des établissements scolaires est évidente : les parents doivent retourner travailler. En effet, de nombreux parents sont actuellement contraints de ne pas aller travailler pour s’occuper de leurs enfants, ce qui amplifie les conséquences économiques déjà importantes du confinement. Alors que les industriels souhaite une reprise totale de la production au plus vite, avec cette mesure le gouvernement va clairement dans le sens du MEDEF, au détriment de la santé de millions de personnes, et cela, Macron l’assume en disant « le 11 mai, il s’agira aussi de permettre au plus grand nombre de retourner travailler, redémarrer notre industrie, nos commerces et nos services. Le gouvernement préparera sans délais ces réouvertures avec les partenaires sociaux pour que des règles soient établies afin de protéger les salariés au travail, c’est la priorité. » Bien-sûr, si la priorité était réellement de protéger les salariés, alors la solution évidente serait de ne pas les faire reprendre le travail. La priorité est donc bel et bien de relancer la valorisation et le profit.
Des tests oui… Mais pas pour tout le monde !
Alors que l’organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de tester massivement la population afin de placer à l’isolement toutes les personnes porteuse du virus, Emmanuel Macron a annoncé que seules les personnes présentant des symptômes seraient testées… Ce qui n’a aucun sens étant donné que les personnes porteuses du Covid-19 sont très souvent asymptômatiques ou présentent des symptômes très légers et que la période d’incubation peut parfois durer jusqu’à 14 jours. De plus, l’absence de campagnes de dépistages sérologiques massive (qui permet de savoir si la personne a eu ou non le virus) ne permettra pas de savoir quelle proportion de la population est immunisée, ce qui est pourtant une information essentielle dans la lutte contre l’épidémie.
Celà ouvre également la porte à une surveillance de masse grace à des applications de suivi des personnes testés malades : un test de masse rend inutile ce genre de mesures.
Beaucoup de blabla sur l’unité de la nation
Emmanuel Macron s’est en suite lancé dans un long monologue sur la magnifique unité de la nation, la nécessité d’être tous ensemble et de « sortir des sentiers battus et des idéologies« . Une fois de plus, il en appelle à une union nationale fantasmatique, car il sait bien qu’un embrasement social est possible lors de l’après confinement. Pour lui, l’unité de la nation, c’est donc avant tout l’absence de protestations contre sa politique irresponsable qui a causé des milliers de morts lors de cette pandémie. Le Président de l’État bourgeois français s’est même fendu d’une petite phrase sur notre pays tout entier qui « tient sur des femmes et des hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal. » Bien-sûr, il s’agit là de poudre aux yeux, étant donné que cette jolie phrase n’est accompagnée d’aucune mesure concrète d’augmentation des salaires.
Ce long discours confirme donc ce qui était attendu : le gouvernement, loin de prendre des mesures pour protéger la santé de la population, préfère privilégier les intérêts économiques d’une fraction de la bourgeoisie en prévoyant un déconfinement prématuré et une reprise de la production économique dès le mois de mai, au risque de créer une deuxième vague épidémique.