Peaky Blinders : gangsters et lutte des classes

Netflix a annoncé, courant mai, la sortie de la saison 6 de Peaky Blinders fin 2020 ou début 2021. Le tournage a été stoppé au 23e jour à cause de la pandémie de covid-19, mais le retard ne sera pas trop conséquent. Peaky Blinders est une série qui a fait un carton et qui soulève de nombreux points intéressants, en particulier dans notre période d’aiguisement des contradictions sociales et de la pauvreté.

D’abord, si elle parle de la famille des Shelby et de leur gang, implantée dans la Birmingham industrielle des années 20, et du bookmaker et gangster plein de classe Thomas Shelby, il y a en arrière plan toute une fresque du monde ouvrier de l’après guerre, avec l’effervescence révolutionnaire. Freddie, personnage important, est, par exemple, ancien combattant et agitateur du Komintern, et déclenche partout où il le peut des grèves et des révoltes. On a aussi une diaspora Irlandaise apportant au « cœur de la bête » sa lutte de libération nationale.

On y voit de nombreuses contradictions ; en particulier les luttes de classe violente, les grèves ouvrières, la solidarité de classe, mais en même temps, la solidarité des anciens combattants traumatisés par la guerre, base de la violence mafieuse et du clientélisme. Les communistes sont présentés comme désintéressés, et sont réprimés par la répression bourgeoise autant que par les gangs, montrés comme alliés de la réaction. L’intrigue se déroule au sein du clan Shelby, mais ces derniers doivent prendre en compte l’ensemble des données sociales et économiques, ce qui donne à la série toute sa profondeur. Ce clan est d’ailleurs en partie dirigé par des femmes, et celles-ci jouent un rôle majeur dans la série.

On nous présente aussi comme un choix moral le fait d’être un gangster ou un communiste, de tenter de s’élever au niveau des capitalistes ou de détruire le capitalisme en utilisant la violence et l’illégalité. Il y a une vrai démarche derrière tout cela et les personnages sont fortement construits par les choix moraux. Dès le départ, l’agitateur communiste et les républicains sont présentés comme dévoués, refusant de travailler avec la police ou de gagner de l’argent pour eux, n’abandonnant pas leurs proches, etc, alors que les Shelby tentent de manœuvrer pour leurs intérêts. Ils n’hésitent pas à utiliser un populisme social pour gagner de l’influence dans les masses et gagner de la marge de manœuvre, vendant les masses pour leurs propres intérêts.

Toutefois tout n’est pas aussi « noir ou blanc », et les gangsters sont issus de la classe dans beaucoup de cas et gardent une forte culture prolétarienne. Dans les quartiers populaires de Birmingham, les liens restent forts entre tous les éléments issus du prolétariat misérable.

3 commentaires sur « Peaky Blinders : gangsters et lutte des classes »

  1. Sympa cet article sur la lutte de classe à travers le cinéma/la télivision !
    Mais je suis plutot déçu du traitement des communistes autant que de l’IRA. Le personnage du communiste Freddie Thorne ne dure que la saison 1 et l’apparition de membres de l’IRA sont purement anecdotique. Lorsque le salaud d’inspecteur Campbell (que Sam Neill joue à merveille) dit affronter une hydre à trois têtes (les Peaky Blinders, les cocos et l’IRA), en vrai il n’affronte que les PB. C’est normal, la série se concentre sur eux mais c’est dommage d’autant réduire l’impact des rouges et des indépendantistes irlandais :/

    1. Oui, il s’agit plus d’une toile de fond, et effectivement c’est surtout présent sur la saison 1, mais cette profondeur sociale se répercute sur l’ensemble des saisons ! Après, bien sûr, on se concentre sur les peakys blinders, mais même eux sont obligés de se plier à certaines conctraintes sociales !

  2. perso, je pense que le fait que Thomas Shelby ne soit jamais heureux est aussi très révélateur de sa perte morale mais aussi en tant que membre d’une classe. Il est perdu et n’est plus à l’aise nulle part, que ce soit avec les membres de sa classe d’origine ou les bourgeois/voyous, même avec sa famille, principalement, ça ne colle plus!
    ça craque de partout! c’est une voie sans issue qui se perd dans une fuite en avant.

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