L’UEFA a décidé d’une reprise de la Ligue des Champions, la plus prestigieuse compétition européenne de Football. Les matchs se joueront en une seule manche à Lisbonne, contrairement à d’habitude où les matchs se jouent en « aller-retour ». De plus, toutes les rencontres se dérouleront à huis clos, dans des stades vides. Il s’agit bien ici uniquement de foot business, d’un football fade, d’un football triste, loin des masses populaires, loin de la ferveur qui fait vibrer des milliers de stades à travers le Monde.
La crise du Covid-19 aura coûté cher aux entreprises du secteur sportif, alors, pour compenser leurs pertes, elles souhaitent à tout prix relancer les compétitions internationales. Et pour cause, les enjeux sont importants : entre les droits télé, les sponsors, les produits dérivés etc, le foot business brasse des milliards d’euros chaque année. La mise à l’arrêt de toutes les grandes compétition a donc fait perdre énormément d’argent aux clubs, aux chaînes de télé et aux sponsors. Bien-sûr, comme d’habitude, les entreprises multinationales et les grands clubs qui avaient de la trésorerie de côté ont pu amortir le choc de la crise quand les petits clubs de deuxième ou troisième division et les clubs amateurs de quartier sont nombreux à s’être retrouvés dans une situation financière très difficile. Cela accroît toujours plus le fossé entre les grands clubs, capables de se payer les meilleurs joueurs et les petits clubs, dont beaucoup ne sont même pas professionnels, qui souvent ne peuvent pas rivaliser. Ainsi, dans le football, comme dans tous les autres domaines, le capitalisme a créé une logique concurrentielle permettant aux « gros » d’écraser, d’asphyxier les « petits ».
Si les grandes compétitions internationales reprennent, ce n’est donc pas pour l’amour du ballon rond, ce n’est pas par ferveur sportive, c’est bien pour des considérations financières, pour relancer la machine économique du foot business. Cela se fait bien évidemment contre l’avis de nombreux supporters qui dénoncent le principe même de relancer les compétitions par soucis économique et qui refusent l’idée de matchs sans public, sans ferveur, bref, d’un football sans âme. Ainsi, le 13 avril dernier, en plein confinement, 45 collectifs de supporters de différents clubs au sein de l’État français, dont beaucoup défendent l’idée d’un football populaire, avaient signé un communiqué commun s’opposant à la reprise des compétitions. Dans ce communiqué, on pouvait par exemple lire ceci : « Si notre critique d’un football inflationniste, que nous qualifions de « foot business », donne parfois le sentiment d’être un slogan folklorique, la situation actuelle nous renvoie à sa brutale réalité. À sa brutale inhumanité. À sa brutale vanité. À sa brutale cupidité. À son insupportable indécence. Dans un modèle économique où tout n’est que court-terme et où l’imprévu et l’aléa sont perçus comme l’apocalypse, l’économie a achevé de prendre le pas sur ce qu’est le sport : la performance du terrain, l’exploit sportif, les valeurs, l’émotion et la passion, l’héritage collectif, le patrimoine local… Ce football se meurt de s’être arraché à ses racines et de n’être pas capable de voir plus loin qu’un exercice budgétaire, qu’une fenêtre de transferts ou qu’un contrat pluriannuel de retransmission télévisuelle. Privé de sa base et privé de toute vision économique de long-terme, le football est devenu un programme télévisuel qui a cru pouvoir se passer de stades pleins, mais qui ne peut surtout pas se passer de l’argent des diffuseurs. Collectivement, incapables de prendre de la hauteur et de prendre le pouls d’une population en souffrance, certains, au sein des clubs ou des instances sportives françaises ou européennes, ont choisi l’indécence et émis l’idée d’une reprise anticipée. Individuellement, certains se gargarisent fièrement de n’avoir touché qu’une partie de leur prime personnelle sur les droits télévisuels des prochaines saisons. Les mots nous manquent. Mais il nous en reste suffisamment pour partager notre sentiment. ».
Malgré tout cela, malgré l’opposition claire de nombreux supporters de voir reprendre des compétitions sans supporters, les instances du foot business ont donc décidé de relancer les compétitions, au mépris du football populaire, au mépris des revendications de nombreux supporters qui, depuis des décennies, dénoncent les dérives de plus en plus marquées d’un football qui s’éloigne de plus en plus des masses populaires.
Bien-sûr, cette situation n’a pas de solution sous le système capitaliste, car l’essence même du capitalisme est la recherche du profit, et donc la recherche perpétuelle de nouveaux marchés. Le football en est assurément un.