Comprendre le travail salarié

Pour les révolutionnaires, les communistes, l’analyse et la compréhension de la société dans laquelle nous vivons est fondamentale : elle permet de mieux appréhender le monde qui nous entoure, et d’orienter au mieux notre pratique quotidienne pour avancer vers la révolution.

La question du travail salarié est centrale dans l’analyse du capitalisme, c’est pour cela qu’il est nécessaire de se pencher dessus, et d’en comprendre les aspects fondamentaux. Voyons donc les bases de son fonctionnement.

Premièrement, qu’est-ce que le salaire ? Cette question peut sembler simple, banale : elle est pourtant d’une importance particulière, car les choses peuvent être plus profondes qu’elles ne le semblent, surtout lorsque la classe capitaliste s’évertue à effacer, cacher le fonctionnement réel de l’économie capitaliste.

Le salaire, c’est la somme d’argent que le patron paie, pour un temps de travail déterminé (disons, un 35h) ou pour un travail déterminé (pour le travail à la pièce, par exemple) à un ouvrier. En fait, dans cet échange, le capitaliste loue la force de travail de l’ouvrier, c’est-à-dire qu’il loue le fait que le travailleur puisse travailler ; qu’il puisse façonner, trier, couper… pour le capitaliste.

Il faut comprendre une chose très importante : la force de travail de l’ouvrier est une marchandise. Comment le comprendre simplement ? Eh bien, si le patron achète la force de travail d’une personne pendant 1 heure pour 10 euros, il aurait très bien pu acheter 5 kg de sucre, une casquette ou toute autre marchandise qui vaut ces 10 euros.

Résumons simplement ce que l’on vient de dire : la base du rapport salarié réside dans le fait que l’ouvrier échange sa marchandise (sa force de travail) contre la marchandise du patron (l’argent qu’il possède). Et cet argent représente en fait toutes les marchandises imaginables que l’ouvrier peut s’acheter avec (sa nourriture, son logement, ses habits…) : le salaire est le prix ou la valeur d’échange de la force de travail de l’ouvrier.

Le but de l’ouvrier lorsqu’il travaille n’est pas d’avoir 300 t-shirts ou 20 pièces de voiture à la fin de sa journée, mais d’avoir un salaire qu’il pourra échanger contre d’autres marchandises – d’avoir les moyens de subsistance nécessaire pour vivre. En fait, ironiquement, la vie de l’ouvrier commence quand le travail se finit et qu’il peut retrouver sa famille et ses amis, avoir un loisir, manger, dormir…

Dans l’histoire, le travail n’a pas toujours été salarié (c’est-à-dire « libre ») : par exemple, l’esclave des sociétés antiques est vendu dans son ensemble (dont la force de travail) à un propriétaire, qui peut le revendre. Ici, c’est l’esclave lui-même qui est marchandise. De même, le serf du moyen-âge ne vend qu’une partie de sa force de travail, et ce n’est pas lui qui reçoit un salaire du propriétaire mais lui qui paie une rente au propriétaire de la terre qu’il travaille.

Aujourd’hui, sous le capitalisme, c’est différent : l’ouvrier peut être viré, il peut démissionner… Il vend aux enchères des heures de sa vie, jour après jour, au plus offrant. Il ne peut pas arrêter de vendre sa force de travail, car ce serait renoncer à l’existence (sans salaire, pas de bouffe, pas de logement) : il appartient à la classe bourgeoise tout entière.

Dans la société capitaliste, l’ouvrier n’est donc qu’un pion que le patron utilise à sa guise pour maximiser ses profits ; il est celui qui fait tourner le monde, et ne récolte que les miettes.

Posons-nous maintenant une autre question : le salaire se mesure-t-il seulement à son prix en argent ?

La réponse est que non, car il existe trois mesures du salaire :

Le salaire nominal : c’est-à-dire la somme d’argent que l’on touche, le nombre d’euros que l’on gagne. Par exemple, 1 200 euros. C’est la mesure la plus courante du salaire, et pourtant celle qui en dit le moins sur la condition de l’ouvrier dans la société.

Le salaire réel : c’est-à-dire la quantité de marchandises qui est réellement donnée par le salaire. Avec 1 200 euros de salaire, je peux en réalité acheter moins qu’avec la même somme il y a 3 ans (à cause de la montée du prix des autres marchandises). Donc, même si mon salaire nominal (de 1 200 euros) reste le même sur 10 ans, mon salaire réel (mon « pouvoir d’achat de marchandises »), lui, peut augmenter ou baisser.

Le salaire relatif : c’est-à-dire ce que je touche par mon travail, par rapport au profit que le capitaliste va faire avec mon travail. En gros, les marchandises que je peux acheter avec mon salaire par rapport à la valeur d’échange de la nouvelle valeur que je crée en travaillant. C’est ce que l’on touche de la valeur qu’on a créé par rapport à ce qui finit dans le capital du patron.

Lorsque le patron revend la marchandise produite, le prix se divise en 3 parties pour lui :

– une partie qui sert à remplacer les matières premières utilisées, l’usure des machines ou autres moyens de travail qu’il a avancé (cette partie remplace des valeurs qui existaient déjà auparavant)

– une partie qui sert à remplacer le salaire avancé à l’ouvrier

– une partie qui est en excédent, le profit du capitaliste. Le profit se fait par le fait que l’ouvrier ajoute de la valeur au produit qu’il transforme, ce qui permet au capitaliste d’accumuler du capital lorsqu’il vend la marchandise au bout du compte : il se retrouve avec plus de valeur qu’il n’en a mis dans l’échange.

Donc, même si le salaire réel reste le même ou augmente, le salaire relatif peut baisser quand même.

Cela montre que l’exploitation (en termes de valeur pure) est toujours plus grande dans les pays impérialistes, dits « avancés », malgré ce que l’on peut entendre. En effet, on dit souvent qu’aujourd’hui « on a bien plus qu’il y a 50 ans », qu’il « faut arrêter de se plaindre car par rapport à nos anciens nous sommes mieux lotis ». C’est un fait, notre confort de vie s’est amélioré pour la plupart : nous possédons des voitures, nos logements sont chauffés, notre nourriture est diversifiée et nous avons accès à une technologie bien plus avancée que nos grands-parents et parents.

Seulement, si l’on s’en tient à notre analyse, l’exploitation du prolétariat est en fait encore plus grande aujourd’hui. On produit toujours plus de valeur et toujours plus rapidement comparé à nos prédécesseurs, mais la part que nous recevons du gâteau s’amoindrit ! Les dividendes versés aux actionnaires sont toujours plus grands, le capital réinvesti par les patrons s’envole… et nous on reste à 1 200 euros, avec la précarité et les crises comme épée de Damoclès au dessus de la tête.

Tout cela revient à dire qu’en fait, si notre « confort de vie » relatif s’est amélioré – dans les pays impérialistes, car dans les pays opprimés ce n’est pas le cas, sans l’exploitation il serait exponentiellement plus grand, et chaque humain en bénéficierait. Toute la richesse créée par les travailleurs reviendrait dans la société et servirait les travailleurs ; tandis qu’aujourd’hui une majeure partie de la richesse repart « en dehors de la société », dans les poches des actionnaires, des patrons, et ne nous reviens jamais !

C’est pour cela qu’il faut s’organiser, pour combattre la société capitaliste et le travail salarié. Il faut abattre cet ordre des choses par l’organisation de la classe travailleuse contre la classe bourgeoise, exploiteuse. Ne nous laissons plus abattre par la morosité de ce système, comme le dit le chant l’Appel du Komintern :

« Quittez les machines,
Dehors, prolétaires,
Marchez et marchez,
Formez-vous pour la lutte. »

Un commentaire sur « Comprendre le travail salarié »

  1. Un article de génie, comme les précédents à propos des classes, c’est des super synthèses que vous nous offrez là, hâte de voir la prochaine!

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