Depuis plus d’un an, l’industrie de la culture est au point mort. Dans ce milieu où les contrats courts sont la norme, des centaines de milliers de personnes se sont retrouvées au chômage. De plus, c’est une perte énorme pour la petite bourgeoisie, principale consommatrice, qui se retrouve privée de tous loisirs extérieurs issus de cette industrie. Comme dans toute industrie, nous trouvons des exploiteurs, et des exploités ; une bourgeoisie et un prolétariat, ainsi qu’une petite bourgeoisie d’encadrement, mais aussi une petite bourgeoisie indépendante, avec des artistes. Les grandes boîtes du cinéma, du spectacle, les dirigeants, actionnaires, etc, sont la bourgeoisie. Les artistes sont divisés. Salariés ou indépendants, ils sont de petits bourgeois qui peinent souvent à vivre dignement de leur art. Ceux qui, riches et reconnus, vivent grâce au travail de milliers de « petits bras » sans qui on ne pourrait vendre les grands spectacles, font partie de la bourgeoisie. En effet, si ils travaillent bel et bien, leur richesse est principalement issue du travail des autres – ce sont donc des bourgeois.
Dans ce milieu, tout semble se confondre. Des gens au même métier son répartis en classes différentes. Des gens originaires de la petite bourgeoisie ou de la bourgeoisie se déclassent volontairement par passion, se prolétarisant à long terme. Certains grands industriels qui exploitent au maximum la force de travail et rentabilisent la précarité, se disent néanmoins « de gauche« .
La faillite de toute une branche d’industrie et le chômage de masse entraînent une juste réaction de la part des masses. On voit se multiplier les occupations de lieux de travail ou d’étude. Cette révolte est portée par le prolétariat, par les « petits » qui ont de plus en plus de mal à survivre des maigres aides, et doivent souvent cumuler plusieurs emplois. Mais dans un contexte de mise à l’arrêt du monde du spectacle, il y a une utilisation de cette juste révolte par la bourgeoisie, amplifiée par la petite bourgeoisie consommatrice qui se sent « privée » de ses loisirs ou de son travail, et tente de se faire passer pour « le peuple ». Pourtant, les masses populaires sont peu consommatrices de spectacle vivant, en raison d’un grand décalage culturel et de la hausse des prix. Cela cache le fond réel de ce qu’il se passe : une multiplication des occupations. Ce que réclament principalement les participants aux occupations, c’est un revenu pour vivre, peu importe d’où il vient : chômage, aide de l’État, travail… L’occupation est exemplaire et les ouvriers en lutte dans de nombreuses entreprises l’ont bien reconnu. Les messages des ouvriers Aveyronnais luttant contre la liquidation des usines autour de Bosch, l’ont bien prouvé. Mais on voit bien que la réouverture semble un horizon plus crédible pour vivre de son travail : « Nos objectifs sont de défendre et renforcer les acquis sociaux et l’accès à la culture, ainsi que de nous retrouver et de vous retrouver », écrit un collectif Bordelais. C’est sur cette confusion que surfe la bourgeoisie.
Alors même que la situation sanitaire se détériore, la bourgeoisie, aux Césars, se met à pleurnicher : le gouvernement opprimerait « le spectacle », vu comme un tout unique, où la grande bourgeoisie aurait les mêmes intérêts que les prolétaires. Le but pour les bourgeois, c’est simplement de ré-ouvrir, pour recommencer le cycle de l’exploitation et du profit. La déprogrammation, c’est un manque à gagner de 2,6 milliards en terme de chiffre d’affaire. Le Hellfest l’a bien prouvé, en annulant le festival quand leur à été proposé de le limiter à 5000 places. le Hellfest s’attelle à réfléchir « à une façon d’exister cet été« . « Une certitude, ce ne sera pas le Hellfest« . Le but est d’exister, sans dépenser, pour recommencer à faire du profit plus tard. L’ouverture est impossible car elle ne crée pas de profit. Il ne faut pas imaginer le monde du spectacle comme un tout uni. Cette image sert avant tout au travail gratuit de bénévoles, au travail sous-payés, de stagiaires, de personnels associatifs etc. Cela donne une industrie où le travail dérégulé est la règle, où le code du travail est piétiné, avec une image « cool » et marchandable.
Regardant les secteurs de la grande distribution, la FNAC par exemple, la bourgeoisie du spectacle réclame pour elle aussi la réouverture. Ce serait un pas de plus dans le libéralisme, dans le laisser aller d’une épidémie qui n’a été contenue à des niveaux « raisonnables » (on parle quand même de 300 à 400 morts par jours !) qu’au prix de graves restrictions. Les masses veulent un reconfirment dur, elles veulent la vaccination, elles veulent une gestion dure de l’épidémie, elles veulent sortir de la crise le plus vite possible, pas trainer dans un entre deux pour « sauver les profits ». Elles veulent la mise sous cloche du pays pour limiter l’épidémie, la vaccination rapide, une gestion planifiée. Elles ne veulent pas la « réouverture » rapide, de toute façon hors d’accès, financier ou culturel, d’une grande partie de la classe ouvrière.
Bien-sûr, les travailleurs et les travailleuses peuvent réclamer la réouverture, car leur situation économique est plus menaçante que le virus. Mais la bourgeoisie, dans un milieu marqué par un fort esprit de corporation plutôt que de classe, tente de faire croire qu’elle a des intérêts similaires à ceux des exploités. Pour ce faire, elle utilise même une phraséologie qu’elle pense « de gauche ». Quand Corinne Masiero pose nue, c’est une tentative d’être « provocante ». De l’autre côté, on voit bien l’absurdité de la bourgeoisie qui tente de « gérer » l’épidémie pour conserver les secteurs les plus profitables ouverts, sans aucune logique humaine. Les insultes et l’acharnement sexiste contre Corinne Masiero lui permet de se faire passer pour populaire, voir prolétaire, opprimée. Elle a ainsi déclaré : « Ceux qui sont choqués, ce sont beaucoup de personnes de sexe masculin, d’un certain âge, d’une certaine couleur, d’une certaine classe sociale, qui sont choqués quand une personne de sexe féminin d’un certain âge se fout à poil. Ça aussi, ça fait chier, il y a deux luttes là-dedans. Donc, si vous voulez vivre au Moyen-Âge, madame et messieurs, grand bien vous fasse. Moi, j’habite en 2021. » Mais c’est une attitude totalement anti-masses, qui réduit la révolte à une protestation pacifique et des actions « coup de poing » pour « choquer ». Ces personnalités se croient « populaires » ou se font passer pour tel parce qu’elles ont des parents dans le PCF, soixante-huitards, et réduisent la révolte populaire à un misérable libéralisme, éloigné au plus haut point de la vie du peuple. Personne ne parle, sauf pour se moquer, de ce qui s’est passé dans la classe ouvrière, contrairement à ce que peuvent penser les médias d’une gauche libérale et réformiste comme Révolution Permanente, Nantes Révoltée ou Cerveaux Non Disponible. Ces médias vont dans le sens du vent de la bourgeoisie « de gauche », tentent de faire de l’agitation en utilisant la méthode des tabloïds, hurlant d’un côté à la « dictature sanitaire » et appelant à la « réouverture de la vie » tout en pleurant que « l’épidémie est mal gérée ».
Corinne Masiero, pourtant fille de mineur, issue d’une région prolétarienne, marquée par de violentes lutte des classes, par une situation quasi insurrectionnelle en décembre 2018, se montre nue pour montrer que le monde du spectacle est « à poil ». Comme si les grands acteurs, les gens qui passent aux César, étaient en difficulté économique ! Marina Foïs, issue d’une famille bourgeoise et elle même gagnant très bien sa vie, à déclamé un discours misérabiliste pour réclamer la réouverture.
Évidemment, pour nous, travailleurs, c’est absolument ridicule et nous n’aurions pas besoin d’en parler, simplement soutenir les prolétaires en lutte pour leur survie économique et celle de leur emploi, s’allier à la petite bourgeoisie qui se débat pour respirer. Mais nous devons dénoncer sans cesse les machinations de la bourgeoisie sois disant « populaire », qui tente de tromper les travailleurs et les travailleuses et salit l’image de ce qui est réellement populaire, poussant les masses dégoûtées vers le fascisme.