Le lundi 29 mars, à l’Assemblée Nationale, les débats autour de la « loi climat » doivent débuter. Compte tenu du texte présenté par le gouvernement, mais aussi de la nature profonde de l’État capitaliste français, nous savons d’ores et déjà qu’il s’agit ni plus ni moins d’un enfumage, d’un coup de com de la part d’un gouvernement en campagne électorale pour les régionales de juin et les présidentielles de 2022.
En avril 2019, le gouvernement d’Emmanuel Macron a annoncé la convocation d’une « convention citoyenne sur le climat » sur le modèle du « grand débat » organisé quelques mois plus tôt dans le but d’affaiblir le mouvement des gilets jaunes. D’octobre 2019 à juin 2020, 150 personnes tirées au sort parmi la population française ont été chargées de réfléchir à des mesures visant à lutter contre le changement climatique. En juillet 2020, un rapport complet des travaux de cette convention a été remis au gouvernement, avec 149 propositions pour réduire d’au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre de la France.
Une « loi climat » vidée de sa substance
À ce moment là, Emmanuel Macron s’était engagé à reprendre « sans filtre » au moins 146 de ces propositions, se laissant ainsi trois « jokers ». Sans surprise, il avait immédiatement utilisé un de ces « jokers » contre une proposition visant à taxer les dividendes des grandes entreprises afin de financer des programmes écologiques : pour le gouvernement bourgeois de l’État français, taper dans les profits des capitalistes est inacceptable. Sur les 146 propositions restantes, seulement 18 sont reprises intégralement par le gouvernement, 23 sont rejetées et 78 ne sont que partiellement reprises. Les autres mesures sont soit déjà existantes, soit renvoyées à un cadre international.
Emmanuel Macron a donc sciemment menti en affirmant qu’il reprendrait sans filtre au moins 146 des mesures proposées. Nous voyons ici que l’État bourgeois ne respecte même pas ses propres engagements, et la nature profonde de cette convention pour le climat apparaît au grand jour : il s’agissait purement et simplement d’un coup de communication de la part d’un gouvernement qui veut faire croire qu’il se soucie de la crise écologique.
Dans le détail, lorsqu’on regarde quelles sont les propositions qui n’ont pas été reprises par le gouvernement, on constate qu’il s’agit en grande partie de mesures s’attaquant aux intérêts de grandes entreprises. Ainsi, les propositions visant à interdire les publicités pour les produits les plus polluants et les produits trop gras, trop sucrés ou trop salés et à informer les consommateurs du degré de transformation des produits ont été purement et simplement rejetées par le gouvernement. Ces propositions vont à l’encontre des intérêts de grands industriels, principalement dans le secteur agro-alimentaire. Ce secteur d’activité qui brasse des milliards et enrichie d’immenses fortunes, comme par exemple la famille Mulliez, qui tient le groupe Auchan, a une influence très forte au sein de l’État capitaliste français. Et pour cause, à l’époque du capitalisme-impérialisme, les grands États impérialistes sont avant tout des institutions au service des monopoles, des grandes multinationales, dont Auchan fait partie. Il serait ainsi erroné de dire que les lobbys des grandes entreprises pervertissent l’État : c’est avant tout au profit de ces grandes entreprises que gouverne l’État, qui est et a toujours été un instrument au service des intérêts de la classe au pouvoir.
Alors, aujourd’hui, un mois et demi après la présentation en conseil des ministres du projet de « loi climat », il ne reste qu’une coquille vide, vidée de tout le contenu que 150 personnes, probablement de bonne foi, avaient mis plusieurs mois à produire. Comme si le travail de sape mené par le gouvernement pour réduire à néant les 149 propositions ne suffisait pas, la commission spéciale de l’Assemblée Nationale en a rajouté une couche en détricotant encore un peu plus le projet. Ainsi, l’objectif de rénovation thermique des bâtiments, qui était proposé par la convention et qui permettrait d’améliorer les conditions de vie de millions de personnes tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, a été très largement revu à la baisse. La commission a également commandé 16 nouveaux rapports sur divers points des propositions de la « convention citoyenne », comme un moyen d’enterrer certaines de ces propositions.
Aujourd’hui apparaît ainsi au grand jour ce que nous savions déjà : cette convention citoyenne pour le climat n’est qu’un vaste enfumage. En effet, Emmanuel Macron essaye de se faire passer à peu de frais pour le « Président du climat » avec de jolis slogans et des « conventions citoyennes », mais en grattant un peu, on s’aperçoit rapidement que tout cela n’est que de la communication. Le symbole le plus évident de cela est sans doute le projet de référendum visant à inscrire dans la constitution la nécessité de protéger le climat : cela ne changera absolument rien, mais Emmanuel Macron pourra lors de la campagne électorale de 2022 se présenter comme le candidat qui mené des réformes en faveur de l’environnement.
Seul le renversement du capitalisme par la révolution pourra sauver la planète
Si il est évident que le gouvernement bourgeois de Macron n’a que faire de la préservation de l’environnement, et que, pour l’État, les intérêts économiques de la bourgeoisie monopoliste priment sur la préservation de la planète, cette loi climat donne l’opportunité à tous les partis du régime de s’agiter. Ainsi, à un an des élections présidentielles, tous les politiciens opportunistes « de gauche » y vont de leur commentaire pour dénoncer le projet de loi climat et affirmer qu’eux feront bien mieux si ils sont élus. Au fur et à mesure que la farce électorale approche, le bal des opportunistes se fait de plus en plus intense et, il faut bien le dire, ridicule. Le Parti Socialiste et Europe Écologie Les Verts, qui ont gouverné pendant cinq ans (2012-2017), nous expliquent volontiers qu’il faut aller plus loin pour protéger la planète, alors qu’eux-mêmes ont mené une politique ayant profité uniquement aux grandes entreprises qui détruisent l’environnement.
Tout cela n’est que stratégie électorale, alors qu’une part de plus en plus grande de la population prend conscience des désastres qui se profilent à cause du changement climatique. Mais la crise écologique ne vient pas de nulle part, elle est le résultat de l’organisation de la production dans le cadre du système capitaliste. En effet, le système capitaliste pousse à produire toujours plus, pour générer toujours plus de profits. Aujourd’hui, les multinationales ont fait de l’Asie, et notamment de l’Inde et du Bangladesh, une immense usine où des millions d’ouvriers travaillent pour un salaire de misère dans des conditions terribles. Dans ces pays, les entreprises impérialistes ne respectent aucune norme environnementale, causant des milliers de décès et détruisant les écosystèmes. Pour les capitalistes, tout cela n’importe peu : ce qui compte, c’est produire plus, toujours plus, pour faire plus de profits que l’entreprise concurrente, pour gagner des marchés, pour accumuler du capital. Le problème de la destruction de l’environnement n’est ainsi pas un problème individuel que nous pourrions régler en triant nos déchets et en urinant sous la douche. C’est un problème de modèle de production qui ne pourra être réglé que par le renversement total du système capitaliste et son remplacement par le socialisme, c’est à dire le système dans lequel les moyens de production appartiennent à la communauté et sont gérés démocratiquement par les travailleurs, organisés en classe dominante. En effet, il n’y a que dans un tel système que nous pourrons produire non pas pour amasser du profit mais bel et bien pour servir les intérêts de la population, en prenant en compte la nécessité de protéger l’environnement et les conditions de travail des ouvriers.
Ce système socialiste, celui pour lequel nous nous battons à La Cause du Peuple, va totalement à l’encontre des intérêts immédiats de la bourgeoisie, la classe au pouvoir, qui détient les moyens de production et impose sa manière de gouverner aux larges masses populaires. Il faut dire que la bourgeoisie impérialiste ne subit pas (ou très peu) les conséquences du changement climatique : les grands bourgeois vivent dans des zones peu polluées, ne travaillent pas au contact de produits chimiques etc. Dans le même temps, de nombreux travailleurs n’ont pas d’autre choix que de vivre dans des zones polluées, proche de bretelles d’autoroute ou d’usines polluantes. L’environnement est donc bel et bien une question de classe, et seul le prolétariat, classe révolutionnaire par essence, est en mesure de préserver l’environnement, en s’organisant pour la révolution.