Depuis le 14 mai 2021, 4 militants sont en prison au Brésil, dans l’État de Rondônia, à l’ouest du pays. Leur tort ? Avoir défendu le droit des paysans à la terre qu’ils travaillent. Les 4 militants ont été arrêtés par la police militaire proche du camp Manoel Ribeiro qui réunissait 200 familles de paysans. Ils sont désormais des prisonniers politiques et des personnalités publiques et de nombreuses organisations brésiliennes et internationales demandent leur libération. Une première audience a eu lieu le 29/06, où l’accusation a maintenu ses mensonges contre les militants emprisonnés. Nous voulons publier une traduction non officielle d’un document du Centre de Solidarité avec les Peuples (CEBRASPO) qui demande la libération des quatre militants emprisonnés du Camp Manoel Ribeiro.
Plus d’informations à ce propos peuvent être trouvées, en portugais, sur les sites suivants :
https://cebraspo.blogspot.com/
https://www.facebook.com/Abrapo/
LIBÉRATION IMMÉDIATE DES QUATRE MILITANTS EMPRISONNÉS EN RONDÔNIA
LES PRISONNIERS POLITIQUES DU CAMP MANOEL RIBEIRO
Les quatre militants arrêtés le 14 mai 2021 sont en prison dans la ville de Vilhena/RO (abréviation de Rondônia). L’accusation portée contre eux est qu’ils auraient tendu une embuscade sur une route et qu’ils seraient des « guérilleros » armés de frondes et de roquettes. Dans son empressement à incriminer les 4 jeunes, la police militaire les a dénoncés pour tentative de meurtre. Mais, comme les avocats de la défense l’ont déjà dit, il s’agit une fois de plus d’une farce pour incriminer ceux qui se battent pour la terre : c’est la Police Militaire qui a coupé la clôture et envahi un pâturage, en lançant la camionnette sur les paysans.
Avec des arguments délirants et fantaisistes, la Police Militaire dit que les « guérilleros » ont encerclé les policiers sur la route et ont tenté de leur ôter la vie. Les paysans « guérilleros » ont été arrêtés avec un « grand » dispositif de guerre présenté par la police : 2 lance-pierres artisanaux, des pétards « attachés à une pierre », 1 briquet, 2 canifs, quelques feux d’artifice, 1 paire de coupe-ongles, quelques cartouches de fusils de chasse, etc. La prétendue tentative d’assassinat réalisée par les paysans est sans fondement, puisqu’il existe des enregistrements d’images et des témoins qui ont vu qu’il s’agissait d’armes placées là par la police militaire elle-même. La police militaire a filmé l’opération avec des caméras de drones et de voitures, mais lorsque la défense des paysans a demandé que ces images soient montrées, la police militaire ne l’a pas fait. De même, il existe des preuves qu’une arme a été mise en place lors de l’approche. La Police Militaire accuse un des prisonniers d’avoir tiré, mais ces accusations n’ont aucune matérialité, puisque dans les images prises par les paysans, il n’y a aucune trace d’un quelconque coup de feu. La police est tellement délirante que son récit des faits dit que même une « cavalerie » avait été organisée par les paysans.
Les prisonniers ont été conduits par la police militaire au siège de la ferme. De là ont eu lieu des séances de violence, de torture psychologique et de menaces d’exécution qui n’ont pas été mises en pratique parce que l’opération a été filmée par d’autres paysans. Cela montre comment la police agit à Rondônia. Lorsqu’ils ont mené l’opération, ils ont décidé de ne pas emmener les prisonniers au poste de police, mais de rendre compte à un grand propriétaire terrien. Ils le faisaient déjà auparavant, lorsque les policiers ont été dénoncés et arrêtés pour avoir fait du trafic de pistolets pour le compte de l’éleveur surnommé « Toninho Miséria », selon la dénonciation déposée par le ministère public de Rondônia. Le grand propriétaire terrien payait à Emerson Pereira Arruda (3ème sergent de la Police Militaire RO), Wagner Ferreira de Souza (caporal de la Police Militaire RO), Helson dos Santos Sousa (caporal de la Police Militaire RO), Jander Nascimento de Oliveira (soldat de la Police Militaire RO) et d’autres tireurs la somme de R$900.00 par jour pour chacun d’entre eux, comme indiqué dans le dossier 7004681-62.2020.8.22.0014. Selon la Police Militaire RO, il y avait une « association criminelle d’officiers de la police militaire et civile, qui ont été engagés pour faire la ‘sécurité illégale et armée’ de la propriété ».
Le manifeste signé par le CEBRASPO et l’ABRAPO (Association Brésilienne des Avocats du Peuple), qui rassemble les signatures des organisations démocratiques, des intellectuels et des personnalités publiques les plus diverses, exige également la libération immédiate des quatre prisonniers politiques : ESTEFANE, LUIS CARLOS, RICARDO PAULINO et EZEQUIEL. Les prisonniers sont jeunes, sans casier judiciaire et ont rejoint la lutte pour la terre parce qu’ils croient qu’elle est juste et qu’elle est le seul moyen de résoudre leurs conditions de survie et celles d’innombrables autres familles. Parmi ces jeunes, Estefane, étudiante en sciences sociales à l’Université fédérale de Rondônia (UNIR) à Porto Velho, était au chômage pendant la pandémie et s’est rendue au camp pour soutenir les actions de défense sanitaire contre le covid-19 et pour travailler à l’éducation des enfants et des adolescents.
La première audience de la procédure aura lieu mardi prochain, le 29 juin. Nous appelons tout le monde à montrer sa solidarité avec les jeunes militants arrêtés et à exiger leur libération avec des images, des affiches, des banderoles dans leurs réseaux sociaux et des événements publics.
Un résumé à partager sur les réseaux peut être trouvé ici.
MANIFESTE DE PLUS DE 500 ENTITÉS DÉMOCRATIQUES ET DÉFENSEURS DES DROITS DES PEUPLES QUI DÉFENDENT LA LUTTE POUR LA TERRE EN RONDÔNIA ET DEMANDENT LA LIBÉRATION IMMÉDIATE DES MILITANTS EMPRISONNÉS.
Une campagne organisée par le Centre de Solidarité avec les Peuples (CEBRASPO) a réuni plus de 500 signataires brésiliens et étrangers pour défendre le campement Manoel Ribeiro, à Chupinguaia/RO, géré par la Ligue des Paysans Pauvres de Rondônia (LCP) et pour la libération immédiate des militants arrêtés le 14 mai 2021. Fondé sous le slogan « défendre le droit du peuple à lutter pour ses droits », le CEBRASPO, dont le siège national se trouve à Rio de Janeiro, au Brésil, a développé un travail intense ces dernières années, consolidant, jour après jour, sa proposition de soutenir ceux qui luttent, au Brésil et dans le monde. Outre la défense du droit au travail, à un salaire digne, à la santé, à l’éducation, au logement, à la terre pour ceux qui la travaillent, entre autres droits, le CEBRASPO considère que dans une société divisée en classes, et en période d’approfondissement de la crise générale du mode de production capitaliste – qui accroît l’exploitation et l’oppression – il est extrêmement nécessaire de défendre le droit des larges masses à s’organiser, à se politiser et à mener leurs luttes de la manière qu’elles considèrent adéquate et juste.
Parmi les signataires du Manifeste figurent l’Association des juges pour la démocratie, l’Association américaine de juristes / Rama Brasil, l’Association brésilienne pour la réforme agraire, l’Ombudsman général externe du Bureau du défenseur public de Rondônia, le Centre Pedro Lobo pour la défense des droits de l’homme, le Front national contre la privatisation de la santé, l’Association nationale des enseignants des établissements d’enseignement supérieur – ANDES-Sindicato Nacional, João Tancredo, Dr. Jorge Luiz Souto Maior (juriste et professeur titulaire de droit du travail brésilien à l’USP et juge au tribunal régional du travail de la 15e région), Peter Pál Pelbart, Cacique Babau, Carlos Latuff, Georgette Fadel, Armando Babaioff, Soraya Ravenle, la médaillée olympique Marta de Souza Sobral, Dom Roque Paloschi, président du Conseil missionnaire indigène (CIMI) et archevêque de Porto Velho ; Père Julio Lancellotti ; le célèbre professeur et démocrate indien Amit Bhattacharyya et plusieurs intellectuels honnêtes de tout le pays.
Le Camp Manoel Ribeiro était situé sur l’ancienne ferme Santa Elina, la même terre où l’épisode connu sous le nom de « Massacre de Corumbiara » a eu lieu en 1995. Dans un communiqué publié le 23 mai, les paysans ont informé que, par décision unanime de leur assemblée populaire, ils ont décidé d’un retrait planifié et organisé de la zone. Les 200 familles ont réalisé un exploit : elles se sont retirées à l’aube sans être vues par tout le dispositif policier installé autour du camp. Selon le communiqué, elles ont accompli un « jour victorieux pour la révolution agraire » et, grâce à ce retrait, les plans visant à perpétrer de nouveaux massacres contre les paysans ont été déjoués.
Les signatures sur le manifeste sont encore ouvertes, il suffit d’envoyer un e-mail à cebraspo@gmail.com.
Le texte complet du manifeste et tous les signataires peuvent être consultés à l’adresse suivante : https://cebraspo.blogspot.com/2021/05/dezenas-de-entidades-democraticas-e.html.