Travailler dans une chaîne de restauration : Court récit d’une exploitation

Voilà quelques mois que je travaille dans une chaîne de restauration : Courtepaille. En à peine quelques mois, j’ai vu l’exploitation capitaliste au grand jour, j’ai vu les conditions de travail particulièrement inacceptables qui forment le quotidien de mes nouveaux collègues et de la majorité de la population. En quelques mois à peine, la réalité a parlé et, par conséquent, j’ai vu l’actualité du marxisme et la grande pertinence de ce dernier dans notre société actuelle, loin des pseudos-arguments des anti-marxistes. C’est donc par la pratique du travail capitaliste que j’ai vu le prolétariat en action. Je le connaissais déjà par mes origines prolétaires, mais y vivre et travailler augmenta de fait mon niveau de compréhension du monde du travail sous le capitalisme. Cela confirme que c’est bien de la pratique que naissent les idées. Cet article abordera les relations employé.es-employeurs.euses et leurs

particularités, le rythme de travail et le sexisme omniprésent. Ce dernier point sera abordé

par une collègue femme.

Il existe une contradiction extrêmement forte entre les deux classes existantes dans notre société : la bourgeoisie capitaliste et le prolétariat travailleur. Cette contradiction antagonique, cette contradiction de classe, est la conséquence directe du mode d’organisation de l’économie, comprenons l’appropriation des moyens de production (machine et main-d’œuvre) par une minorité (bourgeoisie) et l’exploitation de la majorité de la population (prolétariat). De cela découlent des intérêts fondamentalement différents et qui rentrent en opposition. Les premiers voulant faire plus d’argent, faire augmenter leurs profits, alors que les seconds veulent plus de droits, plus d’importance, avoir plus de poids dans la société qu’ils et elles construisent pour, un jour, la conquérir. J’ai fait l’expérience de ces intérêts diamétralement opposés. Je vais prendre un exemple tout bête : les avis, étoiles et commentaires laissés par les client.es. Ces derniers consistent en un promoteur pour le restaurant, notamment par rapport à sa popularité, mais c’est surtout en ce qui concerne l’argent que cela se joue. Tout d’abord, une meilleure réputation permet d’attirer plus de monde et donc plus d’argent. Mais il y a également des primes qui courent derrière ces fameux avis. Des primes, oui, mais pas pour tout le monde. Nous, travailleurs et travailleuses, ne sommes pas concernés par ces dernières alors qu’elles découlent de notre travail, de notre effort, de notre sueur. Nous sommes tout, faisant tourner le restaurant, récoltons des avis et rien en retour. Bien sûr, une augmentation ou une prime nous concernant ne résoudraient en rien le fondement du problème, à savoir l’exploitation capitaliste. En soi, nous n’avons aucun intérêt à récolter des avis, si ce n’est un petit brin de fierté et de fausses félicitations en provenance des responsables. Nous n’avons rien à y gagner, ils emportent tout. Pour finir sur ce point, je vais prendre un autre exemple. Comme je l’ai dit ci-dessus, leur intérêt réside en plus d’argent pour eux — rien pour nous si ce n’est notre salaire. C’est alors qu’ils nous invitent grandement à vendre, à faire acheter plus, pour gagner plus. Apéritif, entrée, plat, dessert, café, digestif, bouteille… tout y passe et le plus cher possible. Encore une fois, nous n’avons rien en retour. Nous ne sommes que les pions du capitalisme et de sa société de consommation.

Enfin, il y a une particularité dans les relations employé.es-employeur.euses, autrement dit entre prolétaires et propriétaires des moyens de production. Cette particularité consiste dans le fait qu’ils «travaillent avec nous». J’utilise les guillemets, car, pour dire vrai, nous ne le ressentons pas ainsi. Leur travail est superficiel comparativement au nôtre. En ce qui concerne le rythme de travail, il est infernal. Je pourrais même dire qu’il s’agit d’un «rythme d’usine». Courtepaille n’est pas qu’une simple chaîne de restauration, il apparaît plus comme étant de la restauration rapide. Cela impact la qualité, car, sous ses airs pseudos qualitatifs, la réalité en est tout autre. En plus, le rythme de travail a des conséquences sur nos vies respectives. Une fois rentrer, on est lessivé de notre journée et on veut juste se poser, se divertir. Le temps de travail capitaliste vient impacter notre temps de vie personnelle. Le capitalisme vole la vie des prolétaires par l’usure.

En plus, il y a le sexisme omniprésent. Pour en rendre compte, j’ai posé des questions à une collègue et camarade qui, victime de remarques et comportements sexistes, retranscrit un vécu.

– «As-tu déjà fait l’expérience de remarques et comportements sexistes et, si oui, quel est le profil et quelles sont les choses que l’on a pu faire ou dire?»

– «Généralement ce sont des hommes, plus de 40 ans, de la part des jeunes c’est moins fréquent. Les vieux font des sous-entendus pervers, des regards de la même nature. Ils te regardent comme si tu été la nourriture qu’ils vont manger.»

– «Et toi personnellement comment tu vis tout ça?»

— «Ça ne fait jamais plaisir. Mais c’est surtout tu peux pas dire grand-chose parce que tu as un peu le truc du le client est roi et en sachant que tu te prends juste une remarque et parfois un sous-entendu, tu ne peux pas vraiment te plaindre. Ce genre de comportement rentre dans la case des clients chiants au même niveau de celui qui se plaint de son repas et donc, il faut tout de même faire en sorte qu’il passe un bon repas et qu’il achète un maximum.»

– «Du coup, il reste un consommateur comme les autres.»

– «Voilà c’est ça».

– «Est-ce que tu en as déjà parlé à tes responsables et, si oui, quelles ont été leurs réactions?»

– «Je n’en ai pas parlé aux patrons, mais on m’a dit qu’ils n’allaient rien faire. On a un couple d’habitués et l’homme a un comportement sexiste envers moi, mais comme ils sont des habitués, ils achètent et achètent, je ne pourrais pas faire grand-chose.»

– «Et pour finir, comment selon toi résoudre la question du sexisme que tu vis au travail et

au quotidien?»

– «Il faut remonter très loin, mais déjà repenser la place de l’homme et celle de la femme, penser par rapport à l’homme et par ce dernier. La place de la femme a été imposée par celle de l’homme. Il faut se rendre compte que les femmes n’ont aucune liberté, elles ont été piégées petit à petit. Dès que la société a commencé à se construire, les hommes ont pris le pouvoir et ce qu’on appelle la place de la femme aujourd’hui vient du capitalisme et de la société.»

Nous devons, travailleurs et travailleuses, nous doter d’une conscience commune, d’une conscience de classe. Nous devons comprendre que nous ne faisons qu’un contre les capitalistes qui nous exploitent. Nous devons prendre conscience de notre classe et, en conséquence, nous organiser pour faire tomber l’exploitation capitaliste-impérialiste et les inégalités, le racisme et le sexisme qui en découlent inévitablement. Pour accomplir cette tâche unique au prolétariat, seul le marxisme nous en donne les clés.

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