Editorial du mois : Mobiliser, organiser, politiser !

La mascarade électorale se termine avec la victoire peu triomphante du champion de l’oligarchie, des boursicoteurs, des richards – en un mot, des vautours qui se repaissent de la chair du prolétariat. Que dire de ce pitoyable spectacle, si ce n’est qu’il n’y a strictement plus rien à tirer de ce dispositif servant à légitimer et cacher, de plus en plus difficilement, tout le système d’oppression capitaliste. La seule chose digne au milieu de tout cela a été le boycott actif, rondement mené dans les masses de notre pays par des militants et activistes ô combien courageux. En effet, du courage il en fallait pour s’opposer au vieux révisionnisme, dont Roussel est le visage putréfié, et à tous les opportunismes de droite comme de gauche qui trafiquent avec les souffrances de notre peuple pour leurs petits intérêts mesquins. Le fait que 50 000 tracts pour le boycott actif ai été distribués, que des milliers d’affiches aient été collées, que de nombreuses actions d’agitation au contact des masses ont été menées avec détermination, tout cela prouve qu’une autre voie est possible face au supplice de Prométhée enduré par le prolétariat et les masses.

Une voix, autonome de toutes les structures de la bourgeoisie, a retenti pour sonner le tocsin de la seule voie vers la Révolution. Nouvelle Epoque a participé à expliquer et porter ce message d’une grande importance tactique. Nous le répéterons jusqu’à satiété : aucun changement allant dans le sens de l’émancipation, même le plus minime, ne peut passer par une acceptation des règles du jeu de la bourgeoisie. Chaque élection permet de légitimer le système en place et participe à sa réactionnarisation. Il n’existe aucune voie pour l’émancipation du prolétariat et des classes populaires qui passerait par ce simulacre de démocratie. La seule rupture possible passe par le débordement idéologique, politique, organisationnel de toute cette immense structure économique, culturelle, politique que l’on nomme capitalisme. Les gesticulations pseudo-radicales d’un Mélenchon appelant à « voter contre Le Pen », donc objectivement pour Macron, prouvent la volonté qu’ont tous les opportunistes de conserver ce système. Le « front républicain » aura joué à fond son rôle en soumettant les masses, une nouvelle fois encore, à un violent dilemme cornélien : voter pour le pire du futur afin d’empêcher le pire du moment. Mais les masses ne se laissent pas trompée ad vitam aeternam : les taux d’abstention et de votes nuls et blancs auront montré que définitivement, non, les français ne sont pas « des veaux ».

Le nouveau quinquennat Macron qui se profile, c’est la promesse d’une augmentation de la réactionnarisation dans le cadre feutré et impitoyable de la raison d’Etat, c’est-à-dire, en dernier ressort, l’intérêt de la reproduction du capital.

Comme une prophétie auto-réalisatrice, anticipant des « violences urbaines » (des actes de résistance), la capitale avait été cernée d’un imposant dispositif policier le soir des élections, comme pour montrer clairement a tout ceux qui ne l’avaient pas encore aperçu le visage du libéralisme en temps de crise. Ce soir-là, pendant qu’une poignée de parasites et autres opportunistes acclamaient le nouveau gestionnaire au champ de Mars (faut-il y voir un autre signe ?), deux frères étaient lâchement assassinés par les forces de l’ordre du capital, faisant d’eux les premières victimes d’un quinquennat qui s’annonce explosif. Prétextant un refus d’obtempérer, un jeune flic élevé aux hormones du fascisme aura ôté la vie à deux frères avec dix coups de fusil d’assaut et détruit une famille. Linda Kebbab, la déléguée du syndicat FO de la police, aura beau chouiner en s’émouvant de l’utilisation politique de cet évènement, nous continuerons à penser qu’il est intolérable de mourir sous les balles des flics en 2022 dans notre pays. Il est de plus en plus difficile de maintenir l’honneur des flics dans notre République, et ce n’est pas le choix cynique d’une fille d’immigrés charmante comme porte parole qui y changera quelque chose. Nous prédisons mille malheurs à cette engeance qui se dresse entre les masses et le capital – les temps vont être durs pour tout le monde.

Mais le principal, c’est que tout cela est l’expression de la lutte des classes qui bouleverse en profondeur notre monde. Ils ne nous le disent qu’à demi-mot, mais le temps des vaches maigres est arrivé : l’inflation fait s’effondrer nos salaires réels, et le prolétariat va porter tout le poids de la dette et du réarmement militaire sur ses épaules. A n’en pas douter, quand il le faudra, ils nous enverront mourir pour la « patrie » (qu’il faut entendre comme les intérêts privés du capital). Les masses de France, loin d’être amorphes, nous ont ces deux dernières décennies montré un très haut niveau de combativité. C’est la grande expression de la lutte des classes qui traverse le pays et qui pousse l’Etat à se réactionnariser, en faisant passer des lois de plus en plus répressives, en donnant les pleins pouvoirs à la flicaille rageuse (de sa pauvre vie de larbin), en développant toujours plus les dispositifs de contrôle, en organisant le cadre du vol quotidien de la richesse produite par une minorité.

Tout cela n’est que l’expression profonde de la crise du vieux système impérialiste mondial.

La colère est palpable, elle est sourde et elle gronde, l’ambiance est lourde dans le pays aux 36 000 clochers. La misère qui s’étend à travers le pays avec 18 % (12 millions) de pauvres n’est pas une opprobre, comme l’a si magnifiquement exprimé le Président Gonzalo, car c’est elle qui porte le nouveau monde, c’est la source de toute chose. Ce sont des quartiers délabrés, que fuit et ignore la France « qui va bien », que va naître la Nouvelle France. C’est là que sont les futurs nouveaux sans-culottes, les soldats de l’an II, les Communards, les Résistants, ceux et celles qui dirigeront le pays dans le futur. Cette nouvelle France qui sera celle du règne du commun va être poussée, impulsée, par le nouveau monde qui commence déjà à pointer dans les contrées reculées de l’impénétrable Amazonie. Le prolétariat est une classe mondiale unique, nous marchons main dans la main avec tous les peuples du monde, nous sortirons tous ensembles du vieux monde.

C’est donc la misère et la pauvreté organisées scientifiquement par le Marxisme qui vont conquérir le nouveau monde en détruisant l’ancien. C’est vers elles que tous les révolutionnaires doivent immédiatement tourner leurs yeux et toutes leurs attentions. Il est urgent de s’immerger et de vivre avec elles, de partager leur quotidien, les joies et les peines, mais surtout les luttes. Le but est de découvrir le grand protagoniste de l’Histoire, de fusionner avec le prolétariat. Les révolutionnaires doivent arrêter de jeter leurs forces dans la chimère de « l’antifascisme » complètement coupé de la réalité matérielle des masses. Des grandes luttes économiques et sociales s’annoncent, il faudra être présents et les porter afin de politiser les masses, c’est-à-dire de les diriger vers la conquête du Pouvoir. C’est cela, l’antifascisme, être immergé dans les masses comme un poisson dans l’eau pour orienter la colère vers la Révolution, et couper l’herbe sous les pieds de l’opportunisme de droite comme de gauche, pour soutirer les masses au révisionnisme. Le problème réside dans le fait que se lier aux masses demande beaucoup de patience et de détermination, c’est un processus de transformation subjective et collective intense et prolongé. Il n’est plus question de postures, ou de faire un travail politique d’« entre-soi », mais de commencer le long chemin à parcourir au côté du prolétariat pour le découvrir, le rencontrer. Les masses font l’Histoire, c’est de ce principe fondamental qu’il faut partir, et l’appliquer. Avec elles, tout est possible, sans elles tout n’est qu’inutilité.

Nous ne pouvons rester au bord de l’Histoire dans une posture contemplative. Aujourd’hui encore plus qu’hier, notre tâche est donc l’organisation, la mobilisation, la politisation des masses profondes de notre pays.