La lutte de classes est une réalité objective, même pour la bourgeoisie. Donc, quand elle se rend compte que la tension monte un peu trop, que les antagonismes se précisent, la classe bourgeoise a plusieurs solutions.
Elle peut, comme dans les guerres populaires qui ont lieu en ce moment en Asie ou en Amérique Latine, utiliser la violence aveugle, la répression barbare. Avec ses forces armées, elle arrête dans les villages et les villes, elle tire à vue, elle crée des camps de concentration pour les masses. Nous voyons ces méthodes en Inde, en Turquie, au Pérou, aux Philippines.
Elle peut également, comme le passé l’a montré en France, utiliser la « carotte » plutôt que le bâton. En 1968 par exemple, à la suite du grand mouvement ouvrier de Mai-Juin 68, les accords de Grenelle sont mis en place par Pompidou. Le SMIG (ex-SMIC) est augmenté de 35 %, entre autres. Ces accords, même s’ils forcent la bourgeoisie à lâcher des revendications, lui permettent de reprendre l’initiative politique, de pacifier le pays et de s’acheter le calme syndical.
Mais bien plus souvent, la bourgeoisie utilise toute la gamme d’armes à sa disposition, maniant la carotte et le bâton en même temps. Ainsi, on se souvient qu’en 1968, des ouvriers sont morts tués par la police pour avoir continué à résister en Juin.
« L’apaisement », de la poudre aux yeux
Ainsi, l’apaisement n’est qu’un coup de communication de la bourgeoisie. Sa cible ? La partie de la population française qui serait prétendument effrayée du chaos et pour le retour de l’ordre. Si l’on continue le parallèle avec Mai 68, cela veut dire que Macron est à la recherche du même effet que De Gaulle qui avait fait manifester des soutiens sur les Champs Élysées le 30 mai 1968.
Sauf que… Macron n’est pas De Gaulle, 2023 n’est pas 1968, et les masses populaires n’ont pas rejeté la lutte initiée lors du mouvement contre la réforme des retraites. Bien au contraire ! Le blocage, le durcissement du mouvement et, certainement, l’opposition à Macron et à son gouvernement, sont restés très populaires tout au long de cette première partie d’année.
De plus, Macron n’a pas du tout utilisé la carotte en réécrivant son projet de réforme ou en donnant quelques concessions au prolétariat comme on donne des os à un chien. Au contraire, il a organisé le passage de la loi grâce à la constitution et il a refusé de rencontrer les syndicats. En déplacement, il a multiplié les insultes, parlant par exemple de « déni de réalité » pour ceux qui veulent toujours retirer la réforme. Où est l’apaisement là-dedans ?
Une politique impossible
En réalité, Macron n’a plus de marge de manœuvre pour pratique un « apaisement » concret ailleurs que dans les mots. La bourgeoisie impérialiste française, en crise, doit rogner sur ses marges et ne peut rien concéder au prolétariat. Elle vise à augmenter son exploitation, sa répression. La réforme des retraites n’est, en ce sens, qu’un début.
Macron en est réduit à invoquer l’unité de la nation. Il fait terminer ses « 100 jours d’apaisement », comme un symbole, le 14 Juillet. Lui, le Président, y voit sûrement le symbole de la France, de l’ordre et même de la Fête de la Fédération, cet événement de 1790 qui visait à réconcilier le peuple et le Roi. Mais pour la majorité des masses en France, le 14 Juillet rime avec la prise de la Bastille insurrectionnelle de 1789. Le bourgeois Macron devrait se rappeler ce qui est arrivé à l’aristocrate Louis XVI.