Une manifestation intersyndicale a eu lieu mardi 5 décembre à Saint Etienne où se trouve le siège du groupe Casino à la suite de rachats potentiel de supermarchés par d’autres distributeurs. 4000 emplois sont sur la sellette dans la Loire, 55 000 dans toute la France.
Le groupe Casino dirigé par Jean Charles Naouri a désormais une dette estimée entre 6 et 12 milliards d’euros et n’a pas réussi à contenir l’hémorragie. Le groupe aussi propriétaire de Monoprix, Leader Price, Cdiscount, Vival ou encore Spar a été mis en procédure de sauvegarde accélérée par le tribunal de commerce de Paris.
L’État français a déjà reporté une dette de 300 millions d’euros de charges fiscales et sociales. Vendredi, la décision de vendre tous les supermarchés et hypermarchés a été prise par le nouveau consortium d’actionnaires. Pour préparer l’annonce aux employés, une cellule psychologique a été mise en place dans la semaine au siège social.
Les employés craignent d’être laissés à l’abandon par les actionnaires qui magouillent sans aucune pensée pour eux, les syndicalistes dénoncent le PDG Naouri de les avoir mis à genoux ces dernières années. Michel Rieux, délégué syndical central adjoint CGT du groupe Casino dit » Aujourd’hui, les salariés se sentent jetés comme une marchandise périmée. Ils sont dans un dégoût de ce qui a pu se passer. Ils en veulent énormément à monsieur Naouri. Je pense que la colère va monter crescendo dans les prochains jours. On peut s’attendre à des blocages sur le mois de décembre, que ce soit au niveau du siège social, des entrepôts, ou des magasins. Les salariés ne vont pas se laisser jeter à la poubelle sans réagir. »
L’enseigne Casino fondée en 1898 à Saint Etienne a connu une ascension fulgurante.
En 1901 puis 1906, Casino crée sa propre marque de distributeur puis sa propre chaine de distribution avec la fabrication de pain, chocolat… Par la suite l’enseigne met en place des mesures sociales : caisse prévoyance, primes pour les familles nombreuses, les naissances, des allocations familiales et des primes pour la participation aux résultats. Ils créent une association sportive pour faire naitre le corporatisme par le sport. Par la suite, les magasins se transforment en magasin en libre-service et la marque commence son développement à l’international. Dans les années 2010, Leclerc lance une stratégie de baisse de prix intensive, difficile à suivre pour le groupe Casino mais aussi une crise économique et monétaire au Brésil, où le groupe est très implanté a des conséquences financières importantes.
Le 17 décembre 2015, le groupe Casino est la cible de Muddy Waters, un fond spéculatif américain justicier connu pour avoir fait plonger plusieurs groupes chinois. La méthode est toujours la même, le fond cherche des irrégularités dans les comptes des entreprises et profitent pour acheter puis revendre les actions en dénonçant les irrégularités de l’entreprise dans une note détaillée, faisant dégringoler les actions de l’entreprise touchée. Ce jour-là, elle vend à découvert des actions Casino pour les racheter par la suite moins cher tout en mettant en cause Casino, qui aurait un endettement démesuré. L’action vaudrait beaucoup moins que son prix de marché, l’action dévisse alors de 20%. En 2018, les actions de Casino plongent de nouveau. Le groupe, qui ne fait alors plus de gain, continue malgré tout de donner des dividendes à ses actionnaires dont le principal Jean Charles Naouri avec sa holding Rallye qui en profite pour s’enrichir malgré la crise. Cette politique des dividendes finit de détériorer l’état financier de Casino et des salariés au profit des actionnaires. Une stratégie des prix élevés demeure pour contenir l’endettement, les prix de la marque sont supérieurs de 30% par rapport aux concurrents, mais avec l’inflation, les Français se dirigent dans des supermarchés plus abordables.
Jean Charles Naouri est l’actuel PDG du groupe Casino depuis 2005, actionnaire majoritaire et président de la maison mère Rallye, il est également détenteur de la société foncière Euris, ce montage financier lui permet un contrôle du groupe malgré peu d’apports financiers. Ayant été brillant durant ses études en mathématiques en passant par l’ENS et Harvard. Il a été connu en tant que directeur de cabinet du ministère de l’économie sous Mitterrand, puis il rejoint la banque Rothschild. Il est également connu pour être un architecte de la crise de 2008 en ayant écrit un fameux rapport le « Rapport Naouri » menant à la dérégulation des marchés financiers en France. A Casino, il a mis en place des rachats grâce à des montages financiers à base d’endettement.
Plusieurs repreneurs se sont présentés, ce sont finalement les deux milliardaires Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière avec le fond vautour britannique Attestor qui prendront les rennes de ce qui en reste. Kretinsky a lui investit en France et en Europe dans les mines et centrales de charbon, puis dans les médias français endettés (Elle, Marianne…) et récemment a acquérit le géant de l’édition Editis, où une grève est déjà en cours. Il est aussi connu pour optimisation fiscale lors de l’affaire des Panama Papers. Marc Ladreit de Lacharrière est né dans une famille noble. Il dirige la holding Fimalac et est également connu pour avoir recours à l’optimisation fiscale au Luxembourg.
Une lettre a été adressé à Macron par les syndicats pour éviter une perte d’emploi massive dont dans la région stéphanoise. Ils écrivent « Vous ne pouvez rester insensible à la détresse de toute une région dont le patrimoine industriel a été largement sacrifié. Casino reste à ce jour le dernier et unique bastion d’un bassin d’emplois d’ores et déjà bien sinistré » Un préavis de grève est déposé par les syndicats jusqu’à la fin du mois.
Lundi 11 décembre un sit-in est déjà prévu devant le tribunal de commerce par les employés de Casino lors de la présentation du plan de redressement.
Soutien aux employés victime de ce capitalisme mortifère.