Le Mali et l’impérialisme français

Au milieu du mois de janvier, d’énormes protestations ont eu lieu dans tout le Mali contre l’impérialisme français et les sanctions infligées par la Communauté Economiques des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Dans les rues de la capitale Bamako comme dans d’autres villes plus petites, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté avec vigueur, brûlant des représentations d’Emmanuel Macron et des drapeaux français.

Ces manifestations ont eu lieu après que la CEDEAO ait annoncé de nouvelles sanctions contre le Mali suite à la prise de pouvoir d’une junte militaire, qui affirme qu’elle restera au pouvoir pendant au moins 5 ans avant d’organiser de nouvelles élections. La CEDEAO est une structure créée en 1975 permettant aux principales puissances impérialistes de la région, le Royaume-Uni et la France, d’avoir la mainmise sur l’économie et la politique des pays concernés.

Les sanctions prises sont très sévères : les frontières entre le Mali et les membres de la CEDEAO sont fermées, ce qui empêche toute importation dans un pays où plus de 70 % de la nourriture est importée. Les banques maliennes, toutes gérées par des capitaux français, ont été mises en pause, empêchant même la population d’accéder à son argent. Le Franc CFA, monnaie coloniale en place, n’est plus utilisé, ce qui force les Maliens à faire du troc. Nous le voyons, la situation est donc catastrophique pour le peuple, qui voit la France écraser la nation malienne. En effet, les sanctions prises ont principalement été mises en avant par la France – avec le soutien des Etats-Unis -, car elle est la principale puissance coloniale de la région, appuyant sa domination tant par ses monopoles et grandes entreprises que par la force, avec la présence régulière de l’armée française sur le territoire malien.

Face à cela, les masses maliennes demandent la nationalisation des entreprises françaises présentes sur le territoire, la fermeture des instituts et écoles françaises au Mali et l’adoption d’une monnaie locale malienne. Un manifestant à Bamako a déclaré : « Pour nous, Maliens, que manque-t-il ? Être unis. Nous le sommes aujourd’hui face aux sanctions. Nous sommes unis aujourd’hui. Nous allons nous en sortir. Nous sommes prêts, même si cela signifie la mort. » Les masses maliennes sont prêtes à donner leur vie pour en finir avec l’exploitation impérialiste et avoir une nation libérée de toute entrave.

Si la lutte des masses maliennes pour dégager la France de leur pays est foncièrement juste, elle se fait aujourd’hui sous des drapeaux réactionnaires. En effet, la junte militaire au pouvoir au Mali ne mène aucune guerre de libération nationale, elle s’allie au contraire avec les puissances impérialistes russes et chinoises. Le Mali va donc passer du statut de colonie à celui de semi-colonie, n’étant plus exploité de manière exclusive par la France, mais aussi par la Russie et le Chine qui devront partager le gâteau.

La revue « Internationale Communiste » souligne à ce propos que « exploitant l’opportunité que représente la défaite de l’opération Barkhane, ces traîtres sans scrupules invitent l’impérialisme russe à intervenir dans le pays pour sauver leur propre peau de la lutte armée, de la fureur des masses opprimées par les trois montagnes. Ils exploitent cette opportunité pour prostituer leur pays à l’impérialisme russe et s’enrichir personnellement. »

L’opération Barkhane justement, est une opération de l’armée française au Mali ayant vu le déploiement de milliers de soldats français depuis son initiation en 2014. Si aujourd’hui le ministre des Affaires étrangères français Jean Yves le Drian a annoncé le retrait des troupes de l’opération Barkhane du Mali, nous ne devons pas être dupe : ce retrait ne sera ni total, ni définitif. Les impérialistes français, face à la junte militaire, aux impérialistes russes et chinois et surtout à la défiance des masses maliennes, n’ont pas d’autre choix que de se déplacer autre part dans la Sahel temporairement, pour permettre la survie de leur opération impérialiste ratée. Les Maliens ont défait l’opération Barkhane.

L’opération barkhane se cache derrière la « lutte contre le terrorisme », mais ce n’est qu’une façade pour cacher l’exploitation des rapaces qui se trouve derrière. Les islamistes présents en Afrique de l’Ouest contrôlent des territoires larges, sur lesquelles s’étalent de grandes richesses : uranium, or, pétrole, minerai de fer, bauxite, manganèse. C’est pour récupérer le contrôle sur tout cela que la France fait la guerre au peuple malien, et rien d’autre.

Rappelons que la France possède la 4ème plus grande réserve d’or au monde, sans posséder une seule mine d’or sur le territoire français. A l’inverse, le Mali ne possède quasiment pas d’or tandis que son territoire connait 860 mines d’or et en produit plus de 50 tonnes par an.

Nous parlions déjà en mars 2021 dans la Cause du Peuple (un journal frère), du massacre de 19 civils par la France lors d’une frappe aérienne sur un mariage. Des massacres récurrents ont lieu avec l’approbation tacite de l’armée française, qui fait preuve d’une extrême violence sur les populations locales. Beaucoup de sources montrent que les masses du Mali ne voient pas d’un bon œil cette armée étrangère qui répète qu’elle les « protège », alors qu’elle les agresse et les pille.

Le problème principal pour les Maliens n’est donc pas pour l’instant la junte militaire qui a pris le pouvoir, mais l’exploitation impérialiste française.

Les révolutionnaires et les démocrates sincères doivent donc se réjouir de la défaite de l’opération Barkhane et du mouvement du peuple Malien contre l’impérialisme française. L’impérialisme est un vecteur de guerre, de pillage et d’horreur que nous devons combattre implacablement. Toutefois, nous devons nous opposer aux avancées de l’impérialisme russe et ne se faire aucune illusion sur le retrait français au Sahel. Le projet français dans la région est de trouver le soutien d’autres puissances de l’Union Européenne pour diriger une nouvelle opération armée dans le Sahel, avec, pourquoi pas, le soutien Américain en plus.

Dans les autres pays d’Afrique de l’Ouest, la France est aussi mise en déroute : fin novembre, des masses au Burkina Faso ont bloqué un convoi militaire français en route de la Côte d’Ivoire vers le Mali. Le convoi a été retenu par les masses qui lui ont bloqué le passage à Bobo Dioulasso, puis à Kaya, et enfin dans la capitale Ougadougou. À Kaya, le convoi a été contraint de faire demi-tour, et est resté bloqué pendant plusieurs jours par les barricades érigées par les masses. Au total, le convoi a été retenu pendant une semaine. L’armée française a répondu aux blocages des civils par des balles. Pour reprendre l’expression du Parti Communiste du Pérou, les laquais de la réaction « sont courageux face à des masses désarmées, mais effrayés comme des lapins face à la guérilla », face aux masses organisées.

Tous ces évènements récents en Afrique sont le marqueur d’une situation particulière : l’impérialisme est en décomposition avancée au niveau mondial, tandis que les masses luttent avec toujours plus d’ardeur. Les « géants aux pieds d’argile » que sont les impérialistes sont secoués partout, et n’arrivent plus à tenir des positions stables. La situation mondiale est donc en train de se développer en notre faveur, en faveur des peuples opprimés et du prolétariat. Les agresseurs enchainent les guerres, mais aussi les défaites. Les forces s’inversent.