Il y a quelques temps en France, ils n’étaient pas nombreux ceux qui osaient prononcer à haute voix ce mot : victoire. C’est que des décennies d’opportunisme et de reculs nous ont habitué à toujours parler seulement de « défense de nos acquis », « lutte contre la réforme X ou Y » et tout ce qui amène au final à voir surtout l’aspect de la défaite. Il y a 30 ans, la bourgeoisie impérialiste donnait des miettes aux mouvements sociaux comme si c’était des pigeons : ils appelaient ça la social-démocratie. Maintenant, même les miettes sont trop chères, alors ils ont augmenté les coups de matraques et les arrestations.
Et pourtant : voilà plusieurs années que le monde change, dans la crise. Quel meilleur exemple que le peuple palestinien héroïque et son V de la victoire ! Ce symbole si simple, si puissant, qui tout d’un coup se propage dans le monde entier avec un sens pur et clair : victoire pour la résistance, la victoire ou la victoire !
Voilà un slogan que notre camarade Georges Ibrahim Abdallah, enfermé 40 ans dans les geôles françaises, n’a pas découvert hier. Il l’a scandé derrière les barreaux, et il l’avait en tête bien avant son arrestation, lui qui a donné sa vie à l’émancipation humaine ce qui voulait dire chez lui : liberté pour le Liban et la Palestine, à bas l’impérialisme ! Et désormais, c’est une réalité.
Une réalité car la décision de justice a été rendue : Georges Abdallah doit être libre. L’acharnement politico-juridique de l’État français et des impérialistes depuis ce jour n’est pas un signe de force mais bien de faiblesse. C’est le vautour qui tente de s’accrocher à sa proie mais qui ne voit pas que celle-ci est vivante, vivace, puissante et s’est défaite de ses griffes.
Et cette victoire n’est pas tombée du ciel : c’est 40 ans de combat, et une intensification continue de la mobilisation populaire qui a culminé dans la grande manifestation de Lannemezan où 4 000 personnes ont exigé sa libération. Comme l’a dit la justice bourgeoise elle-même dans sa décision : le maintien en prison de Georges Abdallah pose désormais un problème de troubles à l’ordre public. Et immédiatement après la publication de cet éclair de lucidité en novembre, le 06 décembre, des blocages de fac et de lycées sont venus confirmer la crainte des juges.
Voilà, prenez-en de la graine, ennemis et faux alliés du mouvement ouvrier : c’est ça le véritable rapport de forces ! Ce n’est pas juste de s’asseoir en assemblée générale, d’organiser une grève perlée ou une marche funèbre d’un point A à un point B d’une ville. C’est l’union et la mobilisation générale de sections larges et variées des masses vers un objectif précis ; avec des moyens toujours renouvelés, qui associent le long et ardu travail d’une Campagne Unitaire avec l’explosion et l’audace des actions de blocage, des manifestations combatives et des liaisons multiples qu’elles soient avec la Palestine, les syndicats ou les quartiers. Voilà ce qu’est un plan de bataille !
C’est un point idéologique fondamental : en ce qui concerne la révolution en France, il faut partir de la situation des « deux collines », celle des réactionnaires, et celle des révolutionnaires. Nos victoires sont leurs défaites : pourquoi aurions-nous peur d’affirmer que nous luttons pour vaincre ? Nous avons l’optimisme chevillé au corps précisément car nous ne passons pas notre temps à scruter la réaction, nous célébrons les succès des masses, nos succès, des plus petits dans les quartiers où l’on installe le chauffage, aux plus historiques comme la mobilisation populaire pour Georges Abdallah.
Les défaitistes du mouvement ouvrier vont devoir s’habituer à ce qu’autour d’eux, dans toutes les réunions et actions, émergent la tête haute ceux qui n’ont pas peur de la victoire. Ceux pour qui la victoire n’est pas un mirage mais une nécessité, pour sortir de la misère, pour transformer le monde en faisant bien plus que libérer le plus vieux prisonnier politique d’Europe. Le vent qui souffle est celui des temps historiques : c’est l’offensive stratégique partout dans le monde et en France aussi, nous sentons souffler cette tempête. Accueillons-la : c’est celle des peuples opprimés du monde entier qui nous crient : la victoire ou la victoire !