Le 20 juin aura lieu le premier tour des élections régionales et départementales. D’ores et déjà, le bal des opportunistes commence. Dans nos quartiers, nous pouvons voir des affiches appelant à voter pour tel ou tel candidat, et sur les marchés on peut croiser des candidats qui distribuent des tracts.
De droite comme de gauche, tous les candidats se pressent pour aller chercher de précieuses voix. Comme des charognards, ils sont tous là à nous alpaguer pour nous expliquer à quel point ils changeront les choses et amélioreront nos vies si on vote pour eux. Pour nous, ces gens sont des inconnus, des étrangers : on ne les voit jamais dans nos quartiers, on ne les voit jamais sur nos lieux de travail. On ne les voit qu’une fois tous les deux ans environ, à l’approche des différents scrutins. Là, ils débarquent en groupe, avec leurs jolis tracts, leurs petits drapeaux et leurs belles chemises, parfois même leurs costards, qui coûtent un mois de nos salaires. Ces gens là ne connaissent rien de nos vies quotidiennes et ils prétendent nous représenter dans des institutions remplies de gens comme eux.
Lorsqu’ils viennent dans nos quartiers, distribuer leurs tracts, ont-ils enquêté au préalable pour savoir quels sont nos problèmes ? Non, bien-sûr que non, ils viennent avec leurs idées pré-conçues de ce que sont nos vies, avec leurs préjugés sur nos aspirations. Leurs programmes sont généralement totalement déconnectés de nos réalités quotidiennes, remplis de promesses absurdes écrites dans un jargon technocratique si caractéristique des politiciens bureaucrates sortis des grandes écoles. Ce qui compte, pour eux, ce n’est évidemment pas de se lier profondément avec nous pour comprendre nos problèmes et construire, avec nous, sur le long terme, des solutions. Non, ce qui compte, ce qui les intéresse, c’est que nous mettions un bulletin dans une urne avec leur nom dessus. C’est pour ça que ces gens n’apparaissent qu’à l’approche des élections et que, le reste du temps, on ne les voit jamais. Leur stratégie est cynique : pour eux, il faut être le dernier à avoir été vu, le dernier à serrer des mains, le dernier à faire des sourires.
Face à ces politiciens bourgeois opportunistes, les masses populaires ne sont pas dupes : l’abstention monte année après année, et c’est dans les quartiers ouvriers, en banlieue des grandes villes, qu’elle est la plus forte. Bien-sûr, les médias et politiciens bourgeois s’en inquiètent et affirment que l’abstention nuit à la démocratie. Cela est une mensonge : la démocratie bourgeoise dans laquelle nous vivons n’est qu’une dictature masquée de la classe au pouvoir, la classe capitaliste. L’abstention ne nuit ainsi en aucun cas à la « démocratie » mais est au contraire une conséquence de l’absence de démocratie réelle.
À un an des élections présidentielles, les élections régionales et départementales ne sont considérées par les grands partis que comme un galop d’essai, pour tester leur popularité et affiner leur stratégie de communication. Les candidats qu’on peut croiser sur les marchés n’ont même pas en tête les élections pour lesquelles ils se présentent : ils pensent à ce qui va se passer dans un an, ils pensent au poste de député, de secrétaire d’État, voire de ministre qu’ils auront peut-être si ils font une bonne campagne.
En tous points, ces gens sont nos ennemis, peu importe qu’ils se proclament de droite ou de gauche, peu importe qu’ils promettent de lutter contre la pauvreté ou au contraire de démanteler la sécurité sociale. Qu’ils soient des sociaux-démocrates repeints en rouge – ou en vert comme c’est à la mode – ou des authentique droitards réactionnaires, ces gens ne représentent que différentes nuances de la politique bourgeoise. Si leurs programmes affichés divergent sur certains points, une fois élus, ils mènent tous une politique plus ou moins similaire, qui ne change rien fondamentalement au système et à nos vies quotidiennes.
En cela, les élections ne sont qu’une vaste mascarade visant à légitimer un système à bout de souffle. En nous faisant voter une fois tous les deux ans, ils prétendent que nous avons le pouvoir et donc que nous sommes en démocratie. Mais quel pouvoir avons nous, si ce n’est celui de voter pour des opportunistes qui sont nos ennemis ? Quel pouvoir avons nous lorsque nous ne pouvons même pas prendre les décisions essentielles qui nous concernent dans nos vies quotidiennes ? Nous n’avons pas le pouvoir d’organiser notre travail, cela est imposé par notre patron. Nous n’avons pas le pouvoir d’organiser la vie dans nos quartiers, cela est décidé par la mairie, la département, la région ou l’État. Nous n’avons pas le pouvoir d’organiser nos lieux d’études, cela est décidé par le ministère de l’éducation ou de l’enseignement supérieur. Ils prétendent ainsi que la démocratie c’est déléguer le pouvoir à des politiciens opportunistes par un misérable vote, alors que la démocratie c’est être en capacité, collectivement, de prendre les décisions qui nous concernent sur les sujets qui touchent notre vie quotidienne.