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Alors que le gouvernement de Macron est en train d’adapter ses plans politiques à un calendrier bouleversé par la crise du COVID, en poussant par exemple la réforme des retraites et de l’assurance chômage, il en profite pour également annoncer un nouveau plan d’investissement prévu pour la rentrée.
L’horizon ? «La France de 2030 » a annoncé Macron, à la mi-juillet. Alors que les élections de 2022 se profilent, ces annonces ne sont pas innocentes.
Premièrement, partons de la situation nationale. La France connaît aujourd’hui une crise importante : politiquement, les Gilets Jaunes ont chamboulé le pays en 2018-2019, puis le COVID en 2020 et la crise économique ont profondément impacté nos vies. Il y a eu la récession : 8 % en 2020, une des pires d’Europe, malgré un rebond annoncé à 6 % de croissance en 2021. Le déficit public a explosé en 2 ans, passant de 3 % du PIB en 2019 à 9 % en 2021, dépassant largement les montants de la crise de 2008-2009. Dans cette situation, il n’est pas étonnant que Macron fasse des annonces grandiloquentes pour tirer son épingle du jeu : il ne veut pas que son mandat soit marqué par la crise et l’instabilité. Dans la perspective d’affronter Le Pen dans les élections 2022, prétendre porter la « réindustrialisation » du pays est une stratégie toute trouvée. En effet, la candidate fasciste du Rassemblement National n’a jamais caché sa stratégie « souverainiste », qui pourrait prétendument « sauver » l’économie. Macron cherche à jouer sur le terrain de Le Pen dans ce domaine également, en plus de la sécurité, de l’immigration etc. De cette manière, il se positionne comme un dirigeant soi-disant proche du peuple, « créateur d’emplois » etc.
Deuxièmement, voyons comment ce plan se déploie au niveau international. C’est le monde entier qui subit actuellement la crise. Macron ne veut pas être le dernier au jeu de la reprise économique, alors il est prêt à dépenser sans compter. Cela ressemble au grand plan d’investissement de 2 000 milliards de dollars de Joe Biden aux Etats-Unis, dont Macron admet fortement s’inspirer : Le journal Le Monde cite un interlocuteur du président : « Emmanuel Macron est fasciné par ce que fait Biden » . Au niveau européen également, la stratégie de réforme de Macron fait partie de son plan pour pousser les intérêts de l’impérialisme français. En effet, de nombreuses dépenses ont été autorisées par l’Union Européenne et la Banque Centrale Européenne pour faire face à la crise du COVID lors de la période 2020-2021. Avec la transition politique en Allemagne, où Angela Merkel se retire après plus de 15 ans de gouvernement, Macron entend se positionner pour tirer son épingle du jeu. En lançant dés maintenant son plan d’investissement en France, en parallèle à ses autres réformes anti-populaires, comme la destruction de l’assurance chômage et des retraites, il souhaite donner un modèle à toute l’UE, et ainsi tenter de se replacer en tant que dirigeant potentiel. De janvier à juin 2022, lors des ultimes mois de son mandat, avant une potentielle réélection, Macron pourra compter sur une présidence française du conseil de l’UE.
Tout ce plan n’a donc rien d’anodin. D’un côté, au niveau national, la « réindustrialisation » est un thème de campagne propice pour la bourgeoisie, quel que soit son bord politique : en effet, l’idée de création d’emplois est populaire. Macron, Mélenchon, Le Pen… tous porteront ce projet, avec des variations « vertes », « responsables », « nationales », « souveraines » etc. Mais au fond, c’est bel et bien le même projet : celui de tenter de sauver l’impérialisme français de la crise dans laquelle il s’enfonce en renforçant sa base et en le rendant plus agressif face à ses concurrents européens et mondiaux. Ces plans annoncés par Macron ne répondent pas aux besoins de la majorité des masses de France, mais bien à la classe dirigeante de la société française actuelle : la bourgeoisie impérialiste.