Les deux dernières années, 2020 et 2021, ont été marquées par des catastrophes naturelles en série. Des incendies en Australie, Amazonie, Californie, Algérie… des tempêtes dans l’Atlantique, plus de 30 en 2020 alors que la moyenne des 40 dernières années était de 8 par an. La sécheresse en Afrique a causé une invasion de criquets à l’est, et plus de 230 inondations ont eu lieu en 2021. Bref, on voit bien que les catastrophes naturelles se multiplient, en réaction au changement climatique. Les dégâts, humains comme économiques, touchent bien plus les pays opprimés que les pays impérialistes. La revue The Lancet estime par exemple que seulement 4 % des pertes économiques dans ces pays sont assurées. On a par exemple vu cet été des familles entières perdre leur maison et leur bétail dans les incendies de Tizi-Ouzou, en Kabylie. Ce sont donc les franges les plus opprimées du peuple, dans les pays les plus pauvres, qui souffrent le plus de ces catastrophes, tandis que la bourgeoisie s’en sort toujours.
Mais un autre point qu’il faut prendre en compte, c’est que les catastrophes naturelles touchent de manière disproportionnée les femmes, particulièrement les femmes des masses. Si l’on prend quelques exemples, au Japon par exemple, la mortalité féminine a été 50 % plus élevée lors du tremblement de terre de Kobe de 1995. Cela concernait avant tout des femmes âgées qui vivaient dans les zones défavorisées. Au Bangladesh, le cyclone et les inondations de 1991 ont tué 90 % de jeunes filles et de femmes. En 2010 au Pakistan, d’autres inondations ont touché 70 % de femmes et d’enfants, c’est-à-dire près de 13 millions sur les 18 millions de personnes affectées.
Ces chiffres sont rapportés et mis en avant par la bourgeoisie, notamment des organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies (ONU), qui prétend inclure dans son programme l’égalité de genre, notamment face aux catastrophes naturelles. Que ça soit en matière de paix dans le monde ou d’inégalités, l’ONU n’a fait que montrer son inutilité depuis sa création après la 2ème guerre mondiale. Cette question ne fait pas exception. Examinons la conclusion de l’ONU sur ce sujet. On peut lire sur le site de l’UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture) la chose suivante : « Depuis quelques années maintenant, la communauté internationale s’est engagée à promouvoir l’égalité des genres et à encourager l’autonomisation des femmes dans le contexte de la prévention des catastrophes naturelles. ».
Qu’est-ce que cela veut dire ? Eh bien, l’ONU part de deux faits établis. Le premier, nous l’avons déjà dit plus haut, c’est que les femmes, particulièrement les femmes du peuple dans les pays opprimés, sont les plus touchées par les catastrophes naturelles. Cette dynamique est amenée à continuer avec le changement climatique. Le deuxième fait, c’est que les femmes sont très fortement mobilisées dans la réponse aux catastrophes naturelles. Réparations, soins, solidarité dans le village ou la ville, ce sont très souvent des femmes qui sont en première ligne, souvent face à la mort, la maladie, la détresse économique et sociale, de cette reconstruction si importante face à une catastrophe naturelle. Ainsi, de nombreuses femmes donnent leur temps, et parfois leur vie, de manière héroïque. Dans les diasporas, ce sont également les femmes qui organisent le plus souvent la solidarité lorsqu’une catastrophe arrive dans le pays d’origine. Cette réaction particulière des femmes est aussi explicable à la lumière du patriarcat, qui attend en général des femmes une position de « soin » à l’égard de la communauté.
Avec ces deux faits, l’ONU en tire une conclusion : il faut donner une « égalité des chances » entre femmes et hommes face aux risques de catastrophe (c’est-à-dire une égalité devant la mort…) et « autonomiser » les femmes dans leurs « compétences » (c’est-à-dire accentuer leur rôle de « soin ») à travers l’éducation.
Mais en faisant cette réponse au problème des femmes face aux catastrophes naturelles, l’ONU ne fait que révéler son envie de préserver le statu quo bourgeois et patriarcal dans la crise environnementale et climatique. Le point de vue correct sur cette question, ça ne peut pas être de se féliciter que les femmes pratiquent la médecine traditionnelle alors qu’elles meurent en masse dans des inondations toujours plus nombreuses car le capitalisme détruit les écosystèmes et que le patriarcat leur interdit d’apprendre à nager dans certains pays.
L’essentiel, c’est la jonction entre toutes les franges des masses dans la lutte contre les catastrophes naturelles en général. Nous ne sommes pas condamné.e.s à vivre dans un monde en perpétuelle crise. Les soins, la reconstruction, la solidarité, tout cela n’a rien de typiquement « féminin ». Dans le documentaire « Yolanda, dépasser la calamité par la révolution », disponible sur YouTube, on voit le mouvement révolutionnaire aux Philippines unir le peuple, femmes comme hommes, pour reconstruire après un typhon. C’est un exemple de ce qu’il faut faire dans cette situation : alimenter la solidarité avec toutes les masses présentes. La véritable égalité n’est pas atteinte lorsqu’il y a un nombre égal de morts féminines et masculines dans un tsunami, mais lorsque les masses entières, sans distinction de genre, sont mobilisées pour répondre à la catastrophe. Cette jonction est d’autant plus essentielle aujourd’hui, alors que le changement climatique renforce les catastrophes partout dans le monde.