Turquie : face au séisme et à l’Etat, l’entraide populaire se développe

Le 6 février à 4h17 du matin, un séisme d’une magnitude de 7,7 a frappé la ville de Pazarcik entraînant dans son carnage les régions de Maraş, Antakya, Osmaniye, Antep, Urfa, Amed, Malatya, Kilis, Adiyaman, Adana… mais également le nord de la Syrie et le Rojava. A 13h24, un second séisme dont l’épicentre était à Elbistan a de nouveau ébranlé les mêmes régions.

Selon les déclarations officielles, 16 170 personnes ont perdu la vie au 10 février, 69 784 ont été blessées, des milliers de bâtiments ont été détruits. L’ampleur totale du séisme n’a pas encore été évaluée mais il convient de noter que le nombre de morts est bien supérieur aux estimations données par les médias bourgeois. De nombreuses villes et villages touchés par le tremblement de terre ont été détruits à grande échelle tandis que la démolition des routes, aéroports et le manque de secours ont condamné des milliers de personnes sous les décombres.

Deux autres facteurs s’ajoutent au résultat dévastateur du tremblement de terre. Premièrement, les conditions hivernales, plus difficiles pour les transports, les secours et les victimes. Deuxièmement, le manque d’équipement et l’inefficacité de l’État face à une telle catastrophe, dans une zone sismique connue comme telle. L’État qui organise son budget en fonction de sa politique de guerre et des intérêts des classes dirigeantes bourgeoises a de nouveau laissé son peuple démuni face à la mort.

En d’autres termes pour l’État, le séisme et ses résultats destructeurs sont « naturels » et « prédestinés », ce qui impose aux peuples se résigner face à la douleur, la mort, la cruauté. Nous ne pouvons accepter et nous soumettre à cette conception. Bien qu’il ne soit pas possible d’empêcher un séisme, il est certainement possible d’en prévenir les conséquences. Dans une zone qui a connu de nombreuses catastrophes sismiques, le système dirigeant n’a pris aucune mesure de prévention. La politique de construction-urbanisation a été le signe avant-coureur des destructions qui ont eues lieu : l’État a octroyé des facilités et financé des patrons rentiers avides de profit dont les constructions bon marché étaient incapable de supporter la moindre secousse.

Dans les dernières décennies, les peuples de Turquie ont déjà connu la douleur, la colère, et les massacres de masses lors des séismes d’Erzincan, d’Izmit, de Bolu et de Van. Les masses prolétaires de diverses nationalités (turque, kurde, arabe, arménienne etc…) sont au milieu d’un grand désastre.

Nous devons accroître notre solidarité.

Nous savons que l’État, qui est le premier responsable d’une si grande destruction, n’a aucune solution à offrir au peuple. L’État pense déjà à utiliser l’argent des dons pour couvrir les déficits budgétaires, ou à tirer profit des produits de première nécessité, pendant que les mêmes entreprises à l’origine des constructions défectueuses, s’apprêtent à bénéficier de contrats publics pour la reconstruction du pays.

Les représentants politiques des classes dirigeantes turques se concentrent essentiellement sur le profit politique qu’ils tireront de ce désastre. Pendant ce temps, l’État, dans sa première déclaration, a menacé les différentes oppositions, en les accusant d’être des « provocateurs » et « manipulateurs », alors que celles-ci participaient simplement à l’effort de solidarité en révélant les réalités de la catastrophe.

A l’heure actuelle, l’état d’urgence a été décrété tandis que l’AFAD (Direction de la gestion des catastrophes et situation d’urgence, organisme d’État) confisque tous les dons collectés, et distribue selon des critères déterminés. Mais l’État, qui est responsable de la destruction et de la souffrance du peuple, ne distribue pas l’aide récoltée de façon uniforme et équitable en fonction des besoins, ce qui s’est déjà produit par le passé lors du tremblement de terre d’Izmit et de Van et lors de la campagne d’aide à Kobane. Dans certaines régions, l’aide de l’État s’est même faite attendre plusieurs jours, entre autres dans des villes peuplées majoritairement par des minorités (arabes, alévies, kurdes etc.)

C’est pourquoi la seule chose qui puisse remédier au désastre que traversent les peuples de Turquie est d’organiser de la manière la plus forte possible notre propre solidarité. L’AGEB (Union des travailleurs immigrés en Europe) organise dans un premier temps une campagne de solidarité financière, compte-tenu que l’aide matérielle est pour le moment bloquée aux frontières ou réquisitionnée par l’État. L’AGEB invite également les forces progressistes et révolutionnaires à relayer la campagne de solidarité.

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