Ce texte sert de courte introduction pour permettre de comprendre le processus de la Révolution Prolétarienne Mondiale.
Pourquoi parlons-nous de révolution mondiale ? D’abord parce que le prolétariat est une classe internationale, qui partage ses intérêts dans le monde entier. Ensuite, car le but final de la révolution, le communisme, ne peut pas être atteint tant que la société de classes existe dans le monde, soit nous y entrons tous, soit personne n’y entre. Par conséquent, la révolution est mondiale.
Malgré cela, cette révolution est réalisée dans des pays en fonction de leur cadre national, et elle se développe donc de façon inégale, pas à l’unisson. Ainsi, au 20ème siècle, la révolution russe de 1917 a permis un grand avancement à la révolution dans le monde, mais tout les dominos ne sont pas tombés en même temps ailleurs en Europe, et l’URSS est devenue une base d’appui à la révolution prolétarienne mondiale dans les autres pays. Ainsi, la révolution prolétarienne mondiale est une unité, quand la révolution arrive dans un pays, cela a un impact dans tous les autres.
En 2024, plus de 100 ans après 1917, certains pensent que la révolution mondiale est morte et enterrée, qu’elle est une histoire ancienne du 20ème siècle, et qu’il faut aujourd’hui se poser de nouvelles questions. Ils pensent que le communisme a échoué. Pourtant, la lutte des classes se renforce dans le monde et les contradictions s’aiguisent !
La contradiction principale à l’époque de l’impérialisme, des guerres et des révolutions, est la suivante : d’un côté il y a des pays oppresseurs (impérialistes) et de l’autre des pays opprimés. C’est dans ce cadre que se développe la contradiction fondamentale du capitalisme, celle entre la production sociale et la propriété privée, entre travail et capital et toutes les autres contradictions. Ainsi le Parti Communiste de Chine indiquait dans l’importante « Lettre Chinoise » de 1963 :
Certains nient même la grande portée internationale de la lutte révolutionnaire des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine contre l’impérialisme et, sous prétexte de faire tomber les barrières de la nationalité, de la couleur de la peau et de la localisation géographique, ils essaient par tous les moyens d’effacer la ligne de démarcation entre nations opprimées et nations oppresseuses, entre pays opprimés et pays oppresseurs, d’étouffer la lutte révolutionnaire des peuples de ces régions […]
Cette « théorie » ne vise pas réellement à faire tomber les barrières de la nationalité, de la couleur de la peau et de la localisation géographique, mais à maintenir la domination des « nations supérieures » sur les nations opprimées. […]
La classe ouvrière […] doit étudier l’expérience révolutionnaire des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, soutenir fermement leur action révolutionnaire, et considérer la cause de leur libération comme le soutien le plus sûr pour elle-même, comme son intérêt direct. Seule cette façon d’agir permet réellement de faire tomber les barrières de la nationalité, de la couleur et de la localisation géographique, et est l’expression du véritable internationalisme prolétarien.
Sans l’union avec les nations opprimées, sans la libération de celles-ci, la classe ouvrière des pays capitalistes d’Europe et d’Amérique n’aura jamais sa libération. Lénine a fort bien dit : « Le mouvement révolutionnaire des pays avancés ne serait, en fait, « qu’une simple duperie sans l’union complète et la plus étroite dans la lutte des ouvriers en Europe et en Amérique contre le capital et des centaines et des centaines de millions d’esclaves ’coloniaux’ opprimés par ce capital. » (V.I. Lénine : Le IIe Congrès de l’Internationale communiste, Œuvres, tome 31)
Certains, qui croient respecter Marx et son œuvre, prétendent que celui-ci pensait que la révolution ne pouvait avoir lieu qu’en Europe, là où le capitalisme était le plus développé. Bien sûr, Marx et Engels1 apportaient une grande attention à l’Angleterre, puis plus tard à l’Allemagne, car c’étaient les pays où le développement du capitalisme et de la classe ouvrière permettait les perspectives les plus complètes à la révolution. Pourtant, dans plusieurs lettres à Véra Zassoulitch, une militante russe, Marx explique comment la révolution démocratique et agraire en Russie pourrait lancer un processus « régénérateur de la société russe », supérieur au capitalisme.
Et c’est sur cette base que Lénine2 développa sa thèse du rôle de la révolution dans les nations opprimées, de la combinaison entre le Mouvement Communiste International et le Mouvement de Libération Nationale contre l’impérialisme. Dans la trop souvent oubliée ‘Adresse au Deuxième Congrès Russe des Organisations Communistes des Peuples de l’Orient’, Lénine dit : « C’est pourquoi je pense que dans l’histoire du développement de la révolution mondiale – qui, à en juger par son début, se poursuivra pendant de nombreuses années et exigera beaucoup d’efforts – dans la lutte révolutionnaire, dans le mouvement révolutionnaire, vous [les peuples d’Orient] serez appelés à jouer un grand rôle et à fusionner avec notre lutte contre l’impérialisme international. Votre participation à la révolution internationale vous confrontera à une tâche compliquée et difficile, dont l’accomplissement servira de base à notre succès commun, car ici la majorité du peuple commence pour la première fois à agir de manière indépendante et sera un facteur actif dans la lutte pour renverser l’impérialisme international. »
Ainsi, les nations opprimées, qui représentent la majorité de l’humanité et se trouvent en Asie, en Afrique, en Amérique Latine et même en Europe Orientale, sont les centres de la Révolution Prolétarienne Mondiale. Elles constituent le Tiers-Monde, ce qui est un point essentiel de la théorie du Président Mao3 : « trois mondes qui se délimitent ». La mention de Tiers-Monde n’est pas négative ou insultante, elle souligne au contraire le rôle central de ces pays dans la révolution. Il ne faut pas la confondre avec la théorie révisionniste qui sera portée par Deng Xiaoping4 et qui revient à prôner l’alliance avec une puissance impérialiste plus « faible » contre une puissance plus forte ou une superpuissance.
Au contraire, c’est une synthèse sur la révolution mondiale. Elle signifie que les luttes des nations opprimées contre l’impérialisme sont celles qui ont aujourd’hui le poids et le potentiel pour le renversement de l’impérialisme. D’autant plus à notre période qui est celle de l’offensive stratégique, où le prolétariat et les peuples du monde entier doivent se jeter à l’assaut de l’impérialisme en décomposition qui vit une crise générale partout et n’épargne aucun pays. Le Président Gonzalo5 dit à ce propos : « C’est une stratégie, c’est une compréhension globale de l’endroit où se trouve le poids des masses sur terre, c’est le problème des relations entre l’impérialisme et les nations opprimées, voilà le problème. C’est un problème qui ne peut être compris que dans la situation internationale actuelle, en partant des relations économiques internationales de l’impérialisme, c’est la thèse de Lénine. »
Il est ridicule d’en conclure que la lutte dans les pays impérialistes est supprimée par cette analyse stratégique, que la révolution ici est impossible. En clarifiant cela, il faut comprendre la révolution socialiste nécessaire en France comme une partie de la Révolution Prolétarienne Mondiale qui est un tout. Cette partie se fera au service de tout le processus, et chaque avancement en Afrique, en Asie, en Amérique Latine et ailleurs nous servira car cela sapera la base de l’impérialisme français et donc, de notre ennemi principal tout comme, en retour, notre processus servira les peuples du monde entier. L’agressivité guerrière actuelle de l’impérialisme, qui défendra à la mort son système monstrueux, doit être vue comme un signe de faiblesse, et pas une force. Une bête sauvage est toujours plus hargneuse à deux doigts de la mort que quand elle est triomphante.
1Fondateurs du marxisme, révolutionnaires allemands ayant vécu à travers l’Europe au 19è siècle
2Grand révolutionnaire russe ayant dirigé la Révolution de 1917
3Grand révolutionnaire chinois ayant dirigé le Parti Communiste de Chine
4Dirigeant de la ligne de droite en Chine, ayant pris le pouvoir dans un coup d’État après 1976 pour embarquer la Chine sur la voie du capitalisme
5Grand révolutionnaire péruvien ayant dirigé le Parti Communiste du Pérou