En Kanaky, l’ordre colonial ne règne plus

Depuis le 13 mai 2024 et le début de la Grande Révolte kanak en « Nouvelle-Calédonie », les forces d’occupation françaises peinent à faire revenir l’ordre sur l’archipel. Le peuple kanak pleure aujourd’hui 9 de ses enfants, tués par la gendarmerie ou les colons français.

Le dernier mort de la répression a été abattu le 15 août par la gendarmerie française, dans une de leurs opérations de « reconquête » de la Brousse1. La résistance kanak tenait tête héroïquement aux forces d’occupation, répondant selon le procureur par : « des jets de pierre, des cocktails Molotov et des tirs d’arme à feu ». Les forces armées françaises prétendent avoir « riposté » sur ce territoire qui n’est pas le leur.

Un mois plus tôt, c’est Rock Victorin Wamytan qui était abattu par le GIGN lors d’une opération de « déblocage » alors qu’il barrait héroïquement la route aux gendarmes le 10 juillet. Il était le neveu du grand chef coutumier kanak et président du Congrès de Nouvelle-Calédonie, Roch Wamytan. Dans un communiqué, l’ensemble des organisations indépendantistes et chefs coutumiers ont dénoncé par ces mots cet assassinat : « L’État français a commis un acte de guerre »

Au mois de juin, l’État impérialiste français a procédé a un grand coup de filet dans la direction du Mouvement National Kanak. Treize indépendantistes ont été mis en examen, dont sept incarcérés, déportés en métropole et placés à isolement. En réaction, des points de blocage avaient été réinstallés et durcis, paralysant toute une partie de la Brousse.

Après leur arrestation, les indépendantistes sont resté menottés pendant une trentaine d’heures, avec interdiction de parler, alors qu’ils sont transféré de l’autre côté de la terre, à 17 000 km de chez eux. Parmi eux, Frédérique Muliava et Brenda Wanabo-Ipeze ont pu sortir de prison le 10 juillet, peu après l’assassinat de Rock Victorin Wamytan. Assignées à résidence en métropole, elles dénoncent à la « pratique coloniale » de la « déportation politique ». Christian Tein, porte-parole de la CCAT et toujours détenu dans la prison de Mulhouse-Lutterbach (Haut-Rhin), a été récemment élu Président du FLNKS, devenant le principal dirigeant du Mouvement National Kanak.

Depuis le début de la Grande Révolte, onze personnes sont mortes sur l’archipel : principalement de jeunes Kanaks, tués par des miliciens blancs ou des gendarmes. Deux gendarmes ont été tués, dont l’un par un de ses collègues. Le bilan des émeutes depuis le 13 mai est très lourd : environ 3000 personnes arrêtées, 200 maisons incendiées ou pillées et près de 900 entreprises et commerces mis hors d’activité. Le gouvernement français estime le « préjudice » total à 2,2 milliards d’euros, soit environ deux fois plus que les Grands Soulèvements de Juin 2023, en métropole. Des centaines de familles françaises ont pris la décision de faire leurs valises et de quitter définitivement la colonie.

Comme nous l’avons déjà expliqué dans la Cause du Peuple, la main de fer de l’impérialisme français sur la Kanaky repose sur son positionnement stratégique afin de servir de base avancée dans le Pacifique contre la Chine et les autres puissances environnantes. Ses ressources en nickel massives, malgré toute la propagande pour les déclarer non-rentables et fermer les mines et usines, en font une terre stratégique. Ce qui n’est pas rentable aujourd’hui le sera demain, et 25 % des réserves mondiales, ce n’est pas une ressource qui s’abandonne comme ça. Voilà la raison de l’agressivité française.

Début septembre, le FLNKS a tenu son congrès annuel divisé, les forces ne soutenant pas la CCAT ayant boycotté l’événement. Après la récente tentative de coup de force de l’État français pour dégeler le corps électoral, la page de la conciliation semble avoir été tournée, c’est un nouveau chapitre de lutte qui s’ouvre.

1 Espaces ruraux de la Grande Terre, contrôlé en grande partie par les indépendantistes kanaks depuis la semaine du 13 mai.

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