Ces derniers mois, les conflits armés explosent en guerres de différents types, dans différentes régions du monde. Voilà quelques années qu’en arrière-plan de nos vies en France, et au premier plan de la vie des masses au Yémen, en Palestine ou en Ukraine, les sombres mélodies guerrières de l’impérialisme retentissent. Comment comprendre cette question ?
L’ère de l’impérialisme et des révolutions prolétariennes et le problème de la guerre
Au tournant entre le 19ème et le 20ème siècle, nous sommes entrés dans une ère nouvelle, l’ère de l’impérialisme et de la révolution prolétarienne mondiale. Bien que 120 années se soient écoulées, c’est toujours l’époque dans laquelle nous nous trouvons, où l’impérialisme doit être balayé par l’assaut des peuples guidés par le prolétariat international. Friedrich Engels, un grand révolutionnaire et théoricien, en parlait en 1893 en mettant cette nouvelle époque en relation avec celle des révolutions bourgeoises, qui dura presque 600 ans : « Maintenant, comme en 1300, s’ouvre une ère historique nouvelle […] prolétarienne. »[1]
Dans la période dans laquelle nous vivons, des guerres de tous types font rage, et la situation révolutionnaire se développe inégalement dans chaque pays mais aussi chaque continent, en fonction des contradictions fondamentales qui s’expriment dans le monde.
Au cours du 20ème siècle, les puissances impérialistes ont déchaîné par deux fois leur arsenal militaire les unes contre les autres : la Première Guerre mondiale (1914-1918) et la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945). En addition, elles ont utilisé leurs armes de destruction contre les peuples un nombre phénoménal de fois, et elles ont armé leurs bourreaux, qu’ils soient étrangers ou des dirigeants corrompus. Elles continuent aujourd’hui dans les quatre coins du globe. N’oublions pas que l’impérialisme français est depuis 1945 en permanence en guerre : le seul pays comparable est, sans surprise, l’impérialisme US !
Ces guerres ont pour but le repartage du monde, la compétition entre les puissances. Selon le révolutionnaire russe Lénine : « Le capitalisme s’est transformé en un système universel d’oppression coloniale et d’asphyxie financière de l’immense majorité de la population du globe par une poignée de pays « avancés ». Et le partage de ce « butin » se fait entre deux ou trois rapaces de puissance mondiale […] qui entraînent toute la terre dans leur guerre pour le partage de leur butin. »[2]
La relation entre les guerres déclenchées par l’impérialisme et la révolution prolétarienne mondiale doit être bien comprise. La lutte du prolétariat russe contre la Première Guerre Mondiale a engendré la Grande Révolution Socialiste d’Octobre (1917), et la lutte antifasciste de dizaines de peuples contre le fascisme-nazi et les invasions a permis de défaire le fascisme et de libérer des pays entiers, comme la Révolution Chinoise (1949) l’a montré.
La tendance à la guerre impérialiste mondiale
Ainsi, notre époque est faite de guerres et de révolutions. C’est toujours vrai aujourd’hui. La tendance à la guerre impérialiste mondiale, pour forcer une issue violente au conflit pour le repartage du monde, est toujours d’actualité. Sinon comment expliquer l’oppression accrue sur les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine ? Toujours plus mis sous la coupe de telle puissance ou de telle autre, ces pays ne sont plus seulement des « sphères d’influence » mais bien des pré-carrés. L’administration indirecte semi-coloniale de ces pays, par la Banque Mondiale, le FMI, l’Union Européenne ou d’autres projets n’a rien à envier au vieux système colonial. Il permet en réalité d’extraire plus de profits par le développement d’un capitalisme bureaucratique parasitaire, ce qu’avaient compris les premiers les impérialistes britanniques et américains.
Dans ce contexte, la guerre mondiale entre les grandes puissances impérialistes reste une menace réelle. Le mensonge libéral répété après 1991, c’est-à-dire que la guerre était impossible et qu’un équilibre était atteint, s’est prouvé faux. L’agression russe en Ukraine a suffi. Mais même auparavant, il était clair que « l’équilibre » proposé n’existait que pour servir la volonté d’hégémonie solitaire de la superpuissance US. A l’échelle historique, la « Pax Americana » des années 1990 et 2000 laisse derrière elle une montagne de victimes de ses sales guerres. En fait, l’impérialisme US a même dépensé parmi les plus grosses sommes de l’Histoire pour commettre certains des plus gros massacres de l’Histoire (guerre d’Afghanistan, guerres du Golfe) alors qu’aucune grande puissance ne pouvait s’opposer à lui.
Aujourd’hui, le mot « guerre » est sur toutes les bouches. Dans la bourgeoisie française, il n’est plus un secret que l’on cherche « l’autonomie stratégique », qu’on ne compte plus sur les US, qu’il faut mettre sur pied une « défense européenne », entre autres projets. Ce contexte, que l’on peut qualifier de militarisation des puissances impérialistes, est marqué par l’augmentation des budgets militaires, de la production d’armements, et le retour de politiques belliqueuses par les États bourgeois (conscription, embrigadement de la société…).
Malgré cela, il faut garder la tête froide. Les guerres à notre époque se développent sur la base économique de l’impérialisme. Cela signifie que pour qu’une guerre mondiale de repartage ait lieu, les grandes puissances impérialistes doivent reconquérir une autonomie stratégique dans la production de plusieurs secteurs qui demandent aujourd’hui l’intégration du marché mondial tout entier (les semi-conducteurs[3] ont par exemple un rôle militaire stratégique dans les communications). C’est cela qui explique la concentration, dans toutes les vieilles puissances impérialistes d’Europe et d’Amérique du Nord vers la « réindustrialisation », la « relocalisation » et autres grandes tendances économiques du moment. En Russie, l’impérialisme russe a réussi à déployer une économie de guerre malgré les sanctions accrues et il écrase l’Ukraine aussi avec sa production militaire. Tout ça alors que la Russie fait office de « nain économique » par rapport aux USA. Cela signifie qu’une guerre mondiale n’est pas imminente, nous sommes dans une période de transition où les conflits explosent à travers le monde et où toutes les puissances impérialistes ont parié sur les prochaines années pour faire leurs préparatifs de guerre. Cela explique l’agitation mondiale que l’on connaît depuis les début de la décennie 2020.
La voie pour conjurer leur programme
Comment s’opposer à leurs préparatifs de guerre ? Comment lutter pour un monde meilleur quand la stabilité apparente s’effondre et que le chaos du système impérialiste se révèle à son grand jour même au cœur des grandes puissances ?
Lénine, cité ci-dessus, a expliqué que les guerres impérialistes étaient menées entre autres pour empêcher la guerre civile de se déclarer, car la bourgeoisie a peur d’être renversée domestiquement. C’est tout à fait vrai. C’est pourquoi la seule manière de s’opposer à la guerre impérialiste, c’est de lui déclarer la guerre révolutionnaire, la guerre populaire. Le Président Mao, grand révolutionnaire chinois, écrivait : « Dès que l’humanité aura supprimé le capitalisme, elle entrera dans l’ère de la paix perpétuelle et elle n’aura plus besoin de faire la guerre. Il n’y aura plus besoin d’armées, de vaisseaux de guerre, d’avions militaires ni de gaz toxiques. Dans tous les siècles des siècles, l’humanité ne connaîtra plus jamais de guerres. Les guerres révolutionnaires qui ont déjà commencé font partie de cette guerre pour la paix perpétuelle. […] L’histoire montre que les guerres se divisent en deux catégories : les guerres justes et les guerres injustes. Toute guerre progressiste est juste et toute guerre qui fait obstacle au progrès est injuste. […]La Première guerre mondiale est un exemple de guerre injuste ; les deux parties y combattaient pour des intérêts impérialistes, et c’est pourquoi les communistes du monde entier s’y sont résolument opposés. Voici comment il faut lutter contre une telle guerre : avant qu’elle n’éclate, il faut faire tous les efforts possibles pour l’empêcher, mais une fois qu’elle a éclaté, il faut, dès qu’on le peut, lutter contre la guerre par la guerre, opposer à une guerre injuste une guerre juste. […] Notre guerre est une guerre sacrée, juste et progressiste ; son but est la paix, non pas la paix pour un seul pays, mais la paix pour tous les pays du monde, non pas une paix temporaire, mais une paix perpétuelle. Pour atteindre ce but, il faut mener une lutte à mort, il faut être prêt à accepter n’importe quel sacrifice et tenir jusqu’au bout ; il ne faut jamais cesser la lutte avant que le but soit atteint. […] Les fascistes et les impérialistes veulent que les guerres se poursuivent indéfiniment. Quant à nous, nous voulons mettre un terme aux guerres dans un temps qui ne soit pas très éloigné. […] Cet espoir n’est pas vain, car le cours du développement social et économique dans le monde nous en rapproche déjà ; et si la majorité des hommes redouble d’efforts, notre but sera sûrement atteint dans quelques dizaines d’années. »[4]
Ainsi, nous avons vu plus haut ce que les impérialistes préparent pour la décennie 2020 et pour les années qui suivent. Il ne tient qu’à nous de nous opposer à leur guerre de façon conséquente, pour que l’humanité conquiert finalement la paix perpétuelle.
[1]Préface à l’édition italienne du Manifeste du Parti Communiste, Friedrich Engels
[2]Préface aux éditions françaises et allemandes, l’Impérialisme, stade suprême du capitalisme, Lénine
[3] Matériau essentiel dans l’électronique, polyvalent entre matériau conducteur et isolant.
[4]De la guerre prolongée, chapitre 9, La guerre pour la paix perpétuelle, Mao Zedong